La méticuleuse délicatesse d’Aliocha Schneider et de Grand Eugène

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Jeudi le 23 novembre dernier, L’Anti Bar & Spectacles a assurément économisé sur le chauffage tellement sa salle était remplie. Pour l’occasion, deux formations charismatiques et chaleureuses avaient fait le chemin de la métropole vers la capitale, Aliocha Schneider et Grand Eugène.

Grand Eugène

Peut-être que le nom de Grand Eugène vous est familier suite à leur passage à St-Roch XP en septembre dernier. Si la formation est habituellement composée de cinq membres, c’est en formule trio qu’elle s’est lancé dans le « Aliocha tour » comme nous l’explique la chanteuse Melyssa Lemieux. En remplacement des membres absents, la basse et la batterie ont été enregistrées sur de vieilles cassettes de seconde main, une idée farfelue et ingénieuse. C’est ainsi qu’Olivier Tanguay et Greg Tremblay-Meadors se sont retrouvé ce soir-là sur une bande ayant précédemment accueilli la musique de Michel Sardou.

Grand Eugène, c’est tendre. Doux et mélodieux, le phrasé de Melyssa coule avec somptuosité en une suite de sonorités qui dorlote, ce qui fait oublier la simplicité de la prose dans certaines pièces. La formation ne s’en cache pas, on peut d’ailleurs même le lire dans leur bio : « Travaillés peu longuement, les mots se chantent comme on parle, à l’abri d’un langage trop complexe. C’est peut-être le désir de se faire comprendre en français dans une ville anglophone (Vancouver) qui a poussé les textes dans cette direction. » Musicalement, chaque son est méticuleusement placé au bon endroit dans une suite de riffs répétitifs sans hooks pour en voler notre attention. Il en résulte une musique enveloppante parfaite pour une ambiance soutenue et sensuelle.

Aliocha Schneider

Faisant parfaitement suite à sa première partie, Aliocha Schneider a pris place sur scène accompagné de Cédric Martel (Brilou) à la basse et d’Olivier Cousineau (Comment Debord) à la batterie. J’étais curieuse de voir le programme préparé. En effet, l’artiste franco-canadien a débuté sa carrière en anglais, mais s’exprime depuis son dernier album dans notre langue nationale. Incertain de son agilité d’écriture en français, c’est suite à la suggestion de sa gérante que l’auteur-compositeur-interprète a d’abord tenté une traduction d’une de ses pièces, Forget My Blues. Si cette transition s’avère parfois maladroite et qu’on y entend les réflexes anglophones dans les textes qui en résultent, Aliocha réussi ici à nos offrir une proposition fluide et tout aussi intéressante. Je dois néanmoins affirmer que malgré l’amour de ma langue, certaines sonorités typiques de l’anglais savent faire ressortir le timbre de l’artiste. J’étais donc heureuse de constater que c’était un doux mélange de l’ensemble de l’oeuvre de l’artiste qui nous attendait.

Cette décision faisait plein de sens. L’album précédent, « Naked », est sorti le 20 mars 2020. Aucun besoin de vous remémorer les raisons et les causes, mais l’album n’a jamais eu de tournée. « J’ai comme deux disques à tourner. Cette toune-là, ça fait 3 ans que je l’ai dans le corps » s’exprime d’ailleurs l’artiste avant de se lancer dans la chanson du même titre. L’artiste a également pigé dans les pièces de son premier album sorti en 2017, « Eleven Songs » dont Sarah écrite pour un amour d’adolescence qui n’a jamais abouti, mais qui a su inspirer une pièce merveilleusement accrocheuse et des anecdotes délicieuses que l’artiste nous raconte en mise en bouche teinté de son charme timide et naïf.

La foule était principalement composée de jeunes femmes attentives. Leurs voix se mélangeaient régulièrement à celle du jeune homme sur scène telle une déclaration d’amour pour sa musique. Il y avait une belle communion avec le public, le genre de moment qui rend ces spectacles uniques. C’était d’ailleurs cette soirée-là l’anniversaire du comédien et ami d’Aliocha, Alexandre Bacon. Celui-ci s’est ainsi joint à lui pour gratter la guitare sur Ensemble se terminant pas la foule qui lui chante d’elle-même un joyeux anniversaire.

La musique d’Aliocha Schneider rejoint tout simplement parce que ses mots sont livrés avec la pureté du coeur et sensibilité. Avec ses musiciens, ils ont livré une prestation tout aussi méticuleuse que Grand Eugène. En ce soir de novembre, les spectateurs ont assisté à un moment empreint de talents et de finesse.

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