Du calme à la tempête avec Flore Laurentienne

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(Photo tirée de nos archives)

Quel plaisir que de se rendre au GTQ afin d’admirer Flore Laurentienne, le projet de Mathieu David Gagnon qui roule sa bosse depuis maintenant quatre ans. En 2019 paraissait « Volume 1 » puis en 2022, « Volume 2 », tous les deux se complètent et sont indissociables tant les trames narratives et mélodiques se ressemblent, s’assemblent et tel un fleuve qui nous fait naviguer à la fois en eaux paisibles et terriblement tumultueuses mêlant cordes classiques et claviers vintage. Au cours du spectacle, le mini-orchestre « né-lectr-o-classique » nous livre aussi de nouvelles compositions très prometteuses tirées d’un nouvel opus inspiré des toiles de Riopelle, rien que ça!

Avant toute chose, il est important de noter que le formation est composée de huit musiciens sur scène, deux violonistes (Fanny Frésar et Mélanie Bélair), une alto (Ligia Paquin), un nouveau violoncelliste (Jérémie) ainsi que Sylvain Deschamps et Antoine Létourneau-Berger aux claviers, marimba et autres percussions, bien sûr Mathieu David Gagnon, compositeur, claviériste et chef d’orchestre ce soir-là et un claviériste d’exception new-yorkais Damon Hankoff.

Le spectacle débute avec deux pièces inédites inspirées des tableaux de Riopelle Feuilles IV et Autriche 3, qui sont des œuvres qui évoquent les thèmes de la nature, des glaciers aux allusions paysagistes (tout du moins c’est ce que j’ai ressenti en allant me renseigner). Ce n’est donc pas sur le Saint-Laurent que commence notre aventure auditive, mais sur la terre ferme, dans d’autres recoins expérimentaux et tout aussi envoûtants que les chansons des deux derniers volumes.

Le titre Promenade m’a ensuite transporté dans l’univers planant de Mathieu. Les violons stridents et parfaitement synchronisés en symbiose avec les Moog qui sonnaient à s’y méprendre comme des thérémines teintés de subtiles improvisations au marimba et batterie nous font découvrir une toute autre version du morceau,

Vint le tour de la pièce Voiles, qui témoigne du lyrisme à profusion sur esthétisme électronique. C’est une véritable symphonie en plusieurs temps qui me donne des frissons. Les cordes vous tiennent à la fois en haleine et rentrent dans le corps au fil des rythmiques et intensités diverses et variées.

Mathieu David Gagnon introduit le morceau Navigation IV sur une note humoristique, indiquant que celui-ci a seulement été commercialisé au Japon, il aimerait d’ailleurs bien en avoir une copie. Avis aux revendeurs, il y a sans l’ombre d’un doute une passe de cash à faire là-dessus. Le compositeur, dans ce qui paraît une gêne à s’exprimer devant le public, nous fait d’ailleurs rire à plusieurs reprises. Ça ne l’empêche pas de nous faire un cours 101 sur la fugue et canon en introduisant les pièces du même nom. L’auto-dérision est le mot d’ordre, là aussi on détruit les codes de la musique (néo-) classique pour le plus grand bien de tous.

La représentation se termine sur un tonnerre d’applaudissements. Deux ovations debout amplement méritées qui nous font profiter du groupe pendant encore deux compositions : Soir tirée de « Volume 1 » et La nuit bleue inspirée encore une fois du travail de Riopelle intitulé toile 54.

L’orchestre réussit donc le pari du mariage parfait si souvent opposé entre la musique électronique et le classique. Ce paradoxe déstabilisant nous amène dans des recoins mélodiques époustouflant d’une grande beauté. Merci.

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