Les Insoumises, c’est un collectif punk féministe intersectionnel faisant la promotion d’artistes femmes, trans, non-binaires et de couleur. J’ai toujours admiré leur travail, au cours des années j’ai découvert au moins une cinquantaine d’artistes grandioses d’ici et d’ailleurs grâce à leurs efforts. Depuis quelques années, le collectif organise différents événements mettant la diversité de l’avant. Comme ces événements ont majoritairement lieu à Montréal, vous imaginez donc mon bonheur de les voir débarquer à Québec avec quatre formations (Feu Futur Moi, Chârogne, Violence City et Rope Skills) au Scanner Bistro le 1er juin dernier.
Feu Futur Moi
Déjà, l’objectif principal de la soirée, soit de faire découvrir des artistes issues de la diversité, est atteint dès le premier groupe Feu Futur Moi, puisque c’était la première fois que je voyais la formation en spectacle. En fait, en toute honnêteté, avant l’annonce du concert, je ne connaissais pas du tout le groupe. Feu Futur Moi, c’est donc un trio de Trois-Rivières qui offre une musique inspirée par le rock alternatif et le grunge des années 1990 avec certaines influences du mouvement riot grrrl. On a d’abord Alexe à la guitare et voix, Mat à la basse ainsi que Bob à la batterie. Musicalement j’ai trouvé que c’était assez intéressant, le mélange d’influences offre des compositions avec un côté plutôt original. La chanteuse paraît assez timide et douce aux premiers abords mais lorsqu’elle se met à crier c’est d’une grande puissance, ça apporte vraiment une facette différente aux chansons. Bref, une très belle découverte pour débuter la soirée, j’aime bien le nom de la formation aussi, Feu Futur Moi représentant une genre de version utopique de soi-même. Le trio prépare un EP qui devrait être disponible à l’automne, j’ai bien hâte d’en découvrir davantage.
Chârogne
Laissez les femmes et personnes de la diversité sexuelle tranquilles -Catherine Jeanne D’Arc
C’est ensuite au tour de la formation montréalaise Chârogne de se présenter sur la minuscule scène du Scanner. Un groupe post-punk avec un message féministe bien assumé qui peut difficilement laisser personne indifférent.e. Le quatuor mettant de l’avant la diversité est formé de Nas Ganon (iel) à la guitare, Jo Franken (il, iel en alternance) à la basse, Sara Blair (elle) à la batterie et Catherine « Bernard » Jeanne D’arc (iel, il, elle en alternance) au chant et à la guitare. Depuis la dernière fois que j’avais vu la formation en spectacle, elle a lancé son opus « Trigger Warning » en mai 2023. Évidemment, la plupart des chansons jouées durant la prestation proviennent de cet excellent projet.
Ce qui retient l’attention est clairement lea bassiste qui arbore un masque de chien, d’ailleurs Catherine lui fait faire des tours, comme lea forcer à faire un solo de basse par exemple. De son côté, Nas porte la cagoule durant tout le concert. Un autre accessoire notable est la chienne de travail au nom de « Bernard » portée par la chanteuse, qui nous explique que puisque les festivals ont de la misère à programmer des femmes, elle s’appelle désormais Bernard. Lançant au passage une flèche à un certain chanteur du nom de Bernard qui effectue actuellement un retour et qui ne semble pas avoir de difficulté à trouver des scènes sur lesquelles jouer. La chanteuse a vraiment le don pour capter l’attention, j’ai bien aimé lorsqu’elle s’est exclamée « On est un band de camp de jour » avant de lancer une chanson à répondre. C’est vraiment une merveilleuse prestation pour le quatuor qui donne toujours d’excellents spectacles. Sans rien enlever aux trois autres groupes de la soirée, c’est vraiment Chârogne qui a volé le show.
Violence City
Violence City est le seul groupe de Québec de la soirée, ça fait un bout que j’espère voir la formation en spectacle, c’est enfin ma chance. C’est un trio rock alternatif avec un côté métal formé de Nicolas Vaillancourt-Simard (guitare, voix), Thomas Emond (batterie) et Lee Ménard (basse). Le groupe a jusqu’à ce jour cinq chansons disponibles mais prévoit la sortie sous peu de son premier EP, « Wasting My Own Chance ». Des refrains accrocheurs, des riffs avec bien de la distorsion tout en gardant un côté mélodique fort agréable, la basse est fuzzée à souhait et la batterie nous offre des rythmes hypnotisants, sans compter les petits tricks de baguettes de Thomas. Bref tous les éléments sont là pour que ça fonctionne. Malgré la courte existence de la formation, on voit clairement qu’elle a déjà des fans qui connaissent les chansons par cœur. Il faut dire que le groupe ne chôme pas, multipliant les spectacles depuis le début de l’année. Et on voit facilement pourquoi, le trio donne vraiment tout un show! C’est visiblement une formation avec un avenir fort prometteur. Le lancement du EP à Québec se fera le 25 juillet prochain à L’Anti Bar & Spectacles en compagnie de Pretty Smile et Fumigènes.
Rope Skills
Trio entièrement féminin de Montréal, Rope Skills avait la tâche ardue de terminer le spectacle aux petites heures du matin. On sent la fatigue gagner petit à petit le public, moi le premier. Qu’à cela ne tienne, le groupe ne fait pas dans les berceuses, c’est plutôt du punk-rock rapide, mélodique et accrocheur. Le trio est composé de Kate Dress à la guitare et voix, Pesca à la batterie et Raw Ksi à la basse. Cette dernière a des « googly eyes » collés sur son instrument, ça attire définitivement l’attention. La formation n’a qu’un seul (excellent) EP à son actif, « Discharge » sorti en 2022, en plus de la chanson de noël Cold Outside disponible sur la compilation « Noël In Extremis II » de 2023. Après un changement de bassiste dans les derniers mois, le groupe travaille sur un premier album complet fort attendu. Sur scène, le trio est énergique et intense, les trois femmes réussissent aisément à convaincre les couche-tard de danser, chanter et moshpitter. Un son rappelant le mouvement riot grrrl combiné au côté mélodique du punk-rock à roulettes, ça donne vraiment un résultat intéressant, on ne peut pas se retenir de scander les refrains en cœur. La chanteuse nous raconte qu’en route vers Québec elles se sont fait arrêter, pour ensuite lancer un « Fuck the police » bien senti avant de jouer la dernière chanson, Homeless. Rope Skills est un groupe qui a su se tailler rapidement une place dans la scène punk rock québécoise, c’est toujours un plaisir de revoir le power trio en spectacle.
On a vu quatre excellents groupes se succéder dans le bar punk de la rue Saint-Vallier. Ça ne serait absolument pas gênant de voir ces quatre groupes fouler les scènes des divers festivals durant l’été alors que les problèmes de parité des programmations sont encore malheureusement bien présents. Bien qu’il semblait y avoir plus de photographes que de public au début du spectacle, on peut finalement dire que c’est mission accomplie pour Les Insoumises avec ce premier évènement dans la Vieille-Capitale. On a en fait eu droit à une bonne foule qui était fort heureuse de célébrer la diversité, ça faisait la file à la table de marchandises après chaque prestation même. On ne peut qu’espérer revoir le collectif créer un événement ici dans le futur, chose certaine j’y serai sans aucune hésitation.
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