Laurence-Anne – « Oniromancie »

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Après avoir charmé tout le monde avec sa « Première apparition », puis entrepris un virage un peu plus synthétique sur « Musivision », Laurence-Anne est de retour avec « Oniromancie », un troisième album touffu, complexe et coloré qui combine les meilleurs éléments des deux premiers tout en permettant à l’autrice-compositrice-interprète d’essayer encore plein de nouvelles affaires dans un univers nocturne qui me rappelle quelques nuits blanches.

On s’installe tranquillement avec Fantôme, une pièce qui renferme un peu tout ce qu’on aime de l’artiste : une pop rêveuse aux arrangements planants, sur laquelle Laurence-Anne nous chante de sa voix aérienne. Une mise en bouche suivie par Mornin’, vraiment dream, qui surprend à chaque détour avec ses synthés et ses effets, même si la pièce risque de dérouter les fans de pop plus traditionnelle.

Ceux-ci vont se reprendre avec la superbe Polymorphe, probablement la pièce la plus conventionnelle de l’album, mais aussi une des pièces les plus abouties de tout le répertoire de Laurence-Anne. Même le texte est particulièrement terre à terre si on le compare à ce qu’on peut entendre ailleurs. « La peur est une fleur / Je connais son odeur / Malgré tout elle arrive toujours / À me rattraper ». Le refrain est est plus accrocheurs, la ligne mélodique est enveloppante et il y a dans cette pièce une lucidité qui fait le plus grand bien au beau milieu du rêve éveillé qu’est cet album.

Entendre Laurence-Anne chanter en espagnol sur Flores, c’est un peu weird, oui, mais il faut reconnaître que la jeune femme a rapidement compris comment la langue de Cervantès a du beat alors qu’elle s’appuie sur les accents toniques de chacun des mots pour nous faire danser doucement.

Troisième toune qui a du rythme de suite, Citadelle est un peu moins forte que Polymorphe, mais la vedette ici, c’est la section rythmique avec sa basse groovy à fond et sa batterie énergique toute en contraste avec la voix toute douce de l’artiste. Ici, on joue avec les contrastes, l’aérien avec le terrestre, le rêve avec la réalité, la douceur avec la fermeté.

On dit souvent qu’une bonne toune l’est toujours dans son plus simple appareil, et c’est ce qu’on voit avec Supernova. Chantée comme on récite un mantra, la pièce regorge d’arrangements somptueux, les couches de synthés se superposent et donnent à la chanson un petit côté grandiose. Et pourtant, j’aimerais tellement l’entendre a capella celle-là!

Si vous aviez besoin d’un autre exemple pour vous convaincre que Laurence-Anne ne fait rien comme les autres, vous n’avez qu’à écouter Politesse. Encore là, une pièce en apparence plutôt conventionnelle cache quelques trésors, notamment une de ces mélodies dont seule l’artiste a le secret. Même une balade comme Ombre sur toi ne peut pas ressembler aux autres balades, ayant plutôt l’allure d’un songe tristounet qu’on écoute en ayant envie de prendre quelqu’un qu’on aime dans nos bras.

L’album se termine à un rythme complètement différent avec Vitesse, une toune qui avance à 119 sur la 20. Une sortie de piste vraiment rapide, comme si Laurence-Anne nous chassait de ses rêves pour pouvoir en profiter elle-même. (Non Jacques, Laurence-Anne te chasse de son cauchemar ici!)

Écouter « Oniromancie », c’est se rendre compte à quel point Laurence-Anne est dans une classe à part. C’est pas tant qu’elle fait les choses différemment, c’est qu’elle parvient à rendre son oeuvre accessible malgré tout ce qu’elle fait de différent. Et cet album est le plus abouti sur ce plan, car même si on vient de passer une semaine à écouter du guitare-basse-batterie 4/4, on n’est jamais assez dérouté par la créativité débordante de Laurence-Anne pour avoir envie de se sauver. Au contraire, on peut écouter l’album deux ou trois fois de suite et y trouver un nouveau truc wow à chaque écoute.

Laurence-Anne a trouvé le bon filon pour elle. Un terrain de jeu immense qu’elle commence à peine à explorer après trois excellents albums. On n’a pas fini d’être (très agréablement) surpris. Tout ce qu’on souhaite, c’est qu’elle fasse de nombreux.ses émules qui vont suivre ses traces pendant quelques minutes avant de partir elleux-mêmes de leur côté, explorer un univers musical qui est tellement loin d’avoir montré tous ses secrets!

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