Orloge Simard – Présenté par L’Anti Bar & Spectacles et lepointdevente.com
9 mai 2020
Mon dernier concert en personne remonte à presque deux mois. C’était à L’Anti Bar & Spectacles, avec un gars originaire du Lac (Gab Bouchard). La suite, on la connaît tous, on l’a tous vécue : #çavabienaller, #restezchezvous, vous connaissez le topo, vous êtes tout aussi confinés que moi.
Oh, bien sûr, il y a eu des centaines de prestations offertes gratuitement sur les réseaux sociaux. Certaines d’entre elles ont même été (assez généreusement) rémunérées. Toutefois, avouons que ces prestations n’avaient pas le même feeling qu’une présence en salle, à quelques mètres de l’artiste et de ses musiciens, entouré d’une bande de mélomanes. C’était plus souvent qu’autrement fait dans l’urgence, avec les moyens du bord, et parfois, il y en avait tellement en même temps qu’on ne savait plus où donner de la tête.
Je ne sais pas pour vous, mais la scène, la vraie, me manque. Les techs de son qui nous mettent du soleil dans les oreilles à coups de décibels me manquent. Les éclairagistes qui émerveillent nos yeux et font pleurer nos capteurs me manquent. Les barmaid et les barmen qui savaient exactement ce que j’allais prendre (alors que j’ai du mal à faire un choix parmi celles que j’ai dans mon frigibière) me manquent. La petite smoke dehors entre la première partie et la tête d’affiche me manque un peu moins, mais elle me manque aussi.
On n’y est pas encore, mais on s’en approche, grâce à du monde qui a décidé de ne pas attendre le retour à l’anormal et qui a décidé de s’adapter, pour le meilleur et pour le pire. Ça donne la série Bar spectacle de nos amis à lepointdevente.com, qui permettra aux artistes de présenter des spectacles rémunérés, avec billetterie, comme dans l’temps, mais à la maison. Avec une équipe technique, ce qui veut dire une certaine plus-value qu’on risque d’apprécier pas mal, ces temps-ci.
Eh ben nous voilà au premier show de la série, présenté par le même qui m’a offert mon dernier show, L’Anti. Avec nul autre qu’Orloge Simard, le philosophe-compositeur-interprète pathétique et vulgaire (ses mots, pas les miens) qui remplit les salles chaque fois qu’il vient à Québec.
Vingt heures pile. Ça se connecte laborieusement. Y’a un peu de monde qui capote, mais c’est un peu normal, c’est un nouveau système, pis même si les essais étaient concluants, fallait s’attendre à quelques anicroches une fois rendu dans le vrai monde. On attend avec le monde qui semble déjà pas mal sur le party. Y’en a même qui se cherchent de la pinotte.
Puis, vers 20 h 15 (soit 15 minutes en retard, ce qui est peu pour un show rock, quand on y pense bien…), on a pu voir une belle vidéo promo qui s’est terminée par un gros « Applaudissez mes tabarnaks! ». J’ai obéi sans rouspéter.
Puis Simard est arrivé avec son guitariste Jimmy Descôteaux, installé ben safe à deux mètres derrière le chanteur et quelques caisses d’Hopera. Dans ce qui semble être un coin de l’entrepôt du sonorisateur du show, on voit un semblant de scène avec de vrais éclairages et plusieurs prises de vues.
On est clairement très loin du gars qui turlute sur son cell dans sa chambre le mardi à 17 h.
Le son est top. Pas mal le meilleur que j’ai entendu dans ces prestations en direct depuis un bout. Les prises de vues changent régulièrement, mais pas à la Musique Plus, alors on ne pogne pas de mal de tête (anyway, à un show d’Orloge Simard, le mal de tête, il vient plus tard…).
Tout ce qu’il manquait, c’étaient les autres musiciens, pis la foule, pour voler littéralement le show avec leurs folies. Personne pour tomber à terre pendant un moshpit, pas de parterre plein assis à ramer pour relever la personne. Juste Simard pis Descôteaux.
On va devoir écouter. Se concentrer sur les textes plutôt que sur l’exubérance du personnage sur scène.
Le personnage que Simard joue dans ses chansons, c’est souvent celui du vieux mononcle, du beau-frère saoul, du gars qui devrait parfois se farmer la yeule. Le gars qui parle de plottes avec un ton qui frôle la misogynie (j’euphémise, là), un peu comme sur Rose flash ou Cabane à pêche. Le gars qui est tout le temps sur la brosse, un peu comme sur Le vin ou Pendaison de crémaillère.
Si Olivier Simard était vraiment ce gars-là, on aurait décroché assez rapidement. Heureusement, il n’en est rien, comme on a pu l’entendre sur des trucs beaucoup plus personnels tels que la magnifique Olivier, qui m’a presque fait tirer une larme, ou T’en souviens-tu Émilie (elle aussi sur À chacun son Waterloo), qui étonne par sa mélancolie et la sincérité de son propos.
Entre les deux, y’a Orloge-le-gars-de-party qui se présente en disant qu’il est James Hetfield pis que la dernière fois qu’il avait joué au Saguenay (par respect pour le Baieriverain, on va dire AU Saguenay plutôt qu’À Saguenay), c’était au Centre Georges-Vézina. Ou qui se lance dans un plaidoyer pour les microbrasseries, qu’il nous encourage à essayer au moins une fois de temps en temps (on a suivi son conseil en buvant de la bière de Limoilou). Ou bedon, qui se lance sur Neige et peanut en faisant référence au commentaire souligné un peu plus haut. Ou qui essaie de nous vendre sa moto, une Honda 800cc, si on se fie à la chanson Moto à vendre. Ou qui nous invite à nous masturber pendant qu’on peut le faire en toute quiétude à la maison.
Quel que soit l’Olivier-Orloge en face de nous, on a pu apprécier la richesse des textes de l’auteur-compositeur-interprète, même les plus vulgaires. Avec sa guitare et celle de Descôteaux, on avait tout ce qu’il fallait musicalement pour appuyer les chansons. Ben sûr, on aurait aimé voir Orloge full band, mais pour le moment, c’était parfait.
Bon, il y a bien eu quelques anicroches. D’ailleurs, pour les personnes qui n’ont pu assister au concert (ça fait du bien d’utiliser autre chose que « prestation »), il y aura une rediffusion, les détails seront communiqués très bientôt. Le clavardoir fonctionnait plus ou moins bien, ce qui est plutôt dommage, mais bon, on a pu se concentrer sur le show (et faire découvrir de la belle poésie grivoise à nos ados). Tous ces problèmes pourront se corriger assez facilement pour le prochain show. Plus de bande passante, de mémoire ou de puissance de traitement sur le serveur, quelques bogues à corriger dans le code, des bogues qu’on ne pouvait pas nécessairement voir pendant les tests de charge.
Alors, cette première « québécoise » d’un show payant en temps de pandémie?
Malgré les embûches, ce fut un gros succès. On SAIT maintenant que le projet proposé par lepointdevente.com est viable et qu’il permet au spectateur d’avoir une expérience qui se rapproche davantage du show télé que de la story Instagram. C’est pas encore un show drette dans ta face, mais si la qualité de la production continue d’y être, je n’hésiterai pas un seul instant à acheter des billets pour d’autres soirées.
Bravo à Orloge Simard pour s’être lancé dans l’aventure et nous avoir offert une prestation qui nous a donné le goût d’avoir du fun pendant 75 minutes bien tassées. On a tous besoin de s’évader un peu, pis c’est exactement ce que Simard nous a offert.
Bravo à Karl-Emmanuel Picard d’être allé au bâton et d’avoir percé l’avant-champ en acceptant de présenter ce premier concert. On avait besoin que quelqu’un monte l’exemple et prenne quelques risques qui, je l’espère, se sont avérés payants.
Bravo à l’équipe de lepointdevente.com, Yannick Cimon-Mattar en tête, pour avoir lancé le projet Bar spectacle. L’idée n’est pas nouvelle (on pense à Sidedoor), mais elle n’a jamais été aussi bien intégrée. Cette gang-là s’y connaît en termes de ventes de billets et elle constitue déjà un excellent lien entre les diffuseurs et les clients.
Maintenant, tout ce qu’on peut souhaiter, c’est que d’autres diffuseurs se joignent à L’Anti Bar & Spectacles, à La Source de la Martinière et au Café du Clocher d’Alma (qui présenteront d’autres événements dans le cadre de la série) pour présenter plein de beaux shows (mais parlez-vous, pas tous en même temps, ok?).