Mile Ex End Montréal – 30 août au 1er septembre 2019

PAR

Samedi 31 août

Emilie Clepper

On a vu l’extraordinaire Emilie Clepper à quelques reprises cet été, alors on ne s’attardera pas trop sur elle, question de ne pas faire dans la redite. Mais bon, on va quand même profiter de l’occasion pour vous dire qu’Emilie Clepper et la grande migration, c’est un fichu de beau disque, pis que les chansons de ce beau disque se transposent magnifiquement sur scène, grâce à la voix incroyable de Clepper (je vous l’ai tu dit que je l’aime encore plus quand elle chante en français? Oui? Ben je le répète!) et à l’excellence de ses musiciens (Vincent Gagnon au piano, PE Beaudoin à la batterie, Patricia Deslauriers à la contrebasse et Claude Amar au violon).

Musique parfaite pour un beau début d’après-midi ensoleillé. Même que quand je fermais les yeux, je n’étais plus sous un viaduc au cœur de Montréal. J’étais au quai de Baie-Saint-Paul, profitant de l’air salin qui me décrassait les narines.

Nicolas Gémus

Je n’avais pas encore eu l’occasion de voir ce jeune auteur-compositeur-interprète dont on dit le plus grand bien. En duo avec un contrebassiste (la contrebasse sera-t-elle la flûte de 2020?), Nicolas Gémus nous propose rapidement quelques chansons de son premier opus. C’est doux et sympathique, même si on sent parfois le jeune âge de l’artiste dans ses compositions qui sont assez traditionnelles. On est dans la chanson tout ce qu’il y a de plus classique, et c’est une maudite belle base sur laquelle évoluer. Un beau gros point de départ pour quelqu’un qui a déjà une fichue belle plume.

Tout le potentiel du monde est là, suffit maintenant que Nicolas l’exploite à fond. Mettons qu’on n’est pas inquiet.

Juste Robert

Bon, a fallu que je me tape trois heures de bus pour voir mon sculpteur préféré chanter ses tounes. Pis qu’est-ce qu’il fait, le torrieux? IL EN JOUE JUSTE SIX!

Naaaaah, soyons sérieux un instant. C’est un secret pour personne, j’aime Juste Robert. Je l’aimais déjà avec Des autoportraits qui montrait tout son talent brut. Je l’aime encore plus depuis Mon mammifère préféré, qui montre qu’il ne fait pas juste gosser des chansons, il est aussi capable de les polir.

En trio avec Martien Bélanger (guitare) et Vincent Gagnon (claviers – oui, encore lui), Jean-Robert Drouillard nous lance ses chansons doucement, et on les attrape le cœur grand ouvert.

Dommage qu’il ait perdu tant de temps à devoir s’accorder à la mitaine (il faisait tellement clair qu’il était impossible de voir les témoins sur les pédales et les accordeurs), même s’il dit avoir longtemps joué désaccordé par le passé (on peut en témoigner). On a sûrement perdu une grosse toune à cause de ça.

Ben oui, je suis chiche de même. Heureusement, je vais pouvoir me reprendre le 7 novembre prochain au Théâtre Petit-Champlain.

Elisapie

Quand j’ai vu Elisapie sur la programmation de Mile Ex End, ma décision était prise, j’allais passer la fin de semaine à Montréal. J’ai entendu The Ballad of the Runaway Girl pour la première fois un peu sur le tard, mais depuis, cet album joue entre mes deux oreilles plus souvent qu’à son tour et je n’ai aucun mal à comprendre pourquoi il s’est trouvé sur la liste courte du Polaris cette année.

Accompagnée d’une belle brochette de musiciens, dont mon beau Joe Grass, qui montre encore une fois qu’il fait tout ce qu’il veut avec une guitare, l’auteure-compositrice-interprète originaire de Salluit a ensorcelé l’ensemble des spectateurs un par un, une chanson à la fois.

Pour donner le ton à la prestation, rien de mieux que Qanniuguma, à la fois douce et entraînante, en crescendo. Elisapie chante d’une voix juste et assurée et se permet quelques moments de chant de gorge pendant que Grass s’amuse avec sa guitare. On est déjà ben impressionné (surtout aux premières loges) quand elle se lance dans une Don’t Make me Blue frissonnante, interprétée avec toute la théâtralité qu’on connaît de la part de la chanteuse. Tout le monde écoute attentivement. Elisapie, elle est comme un aimant, son magnétisme est puissant, et elle en profite pour nous rappeler où on est (un territoire ancien), d’où elle vient (en nous remerciant tout le temps avec de gros Nakurmik, le sourire fendu jusqu’aux oreilles, les grands yeux brillants). Elle nous glisse gentiment qu’il ne faut pas avoir pitié, mais plutôt chercher à comprendre avant de nous lancer, comme ça, juste au bon moment, cette reprise de Willie Trasher, Wolves Don’t Live By the Rules, qu’elle a mise à sa main. Elle nous chante Ton vieux nom en saluant au passage Natasha Kanapé Fontaine, qui l’a aidée à écrire cette douce ballade.

Elisapie ne s’est permis qu’une seule incursion dans son vieux matériel, et elle est allée la chercher loin, celle-là, profitant de la belle écoute du public pour remonter à l’époque de Taima. On en aurait pris plus, plus longtemps.

Elisapie sera à L’Anglicane de Lévis le 19 octobre prochain.

Natasha Kanapé Fontaine

Parmi les moments curieux de la fin de semaine, celui-là fut particulièrement réussi : imaginez, on nous a booké une heure de poésie tout de suite après Elisapie, juste au bon moment pour souper. Et pourtant, la poétesse Natasha Kanapé Fontaine a reçu un accueil chaleureux de la part d’une foule ma foi beaucoup plus nombreuse que je le croyais.

Les spectateurs n’étaient pas seulement nombreux, ils étaient également silencieux, écoutant sagement Natasha réciter ses poèmes, accompagnée à la guitare et au piano par Manuel Gasse. Une chance, parce qu’elle demande beaucoup de concentration. Les textes sont imagés pas possible, il faut vraiment écouter attentivement pour comprendre toutes les nuances.

Mais ça a marché. Complètement et totalement. Test très satisfaisant qu’on risque fort de revoir en salle au cours des prochains mois. I’m all for it!

Daniel Lanois

Dans n’importe quel autre festival d’envergure similaire, Daniel Lanois serait LA tête d’affiche de la fin de semaine. Le gars d’Ancaster, en Ontario, a une des feuilles de route les plus impressionnantes de l’affiche de ce festival. Si on le connaît surtout pour son travail en tant que réalisateur (les bons albums de U2, c’est lui, avec Brian Eno), Lanois est également un fichu de bon auteur-compositeur, et ça, on en est témoin drette là.

Affable et souriant, se donnant même la peine de tasser un pied de micro pour qu’on puisse mieux le prendre en photo quand il chante du gospel avec ses complices, Lanois est un gentleman parfait pour cette messe spirituelle, on s’en rend compte aussitôt qu’il entonne The Maker, qui reste dans les mêmes eaux. Aucun excès musicalement parlant, juste de l’émotion pure et un plaisir qui se sent jusqu’à la billetterie à l’autre bout complètement du site.

Un public extrêmement réceptif communie avec Lanois et sa bande, qui se lancent dans de longues envolées pleines d’âme et d’amour. Il s’est réellement passé quelque chose que je n’avais pas nécessairement ressenti quand j’avais vu le grand homme au Grand Théâtre il y a déjà un petit bout. Quelque chose comme une grand-messe.

Je sais, je ne suis pas le seul à utiliser cette image, mais c’est celle qui correspond le mieux ça ce moment plus-que-parfait.

J’aurais pu m’en retourner à Québec drette là, j’aurais été parfaitement heureux.

Les Cowboys Fringants

Les Cowboys Fringants sont habitués aux grosses foules, aux partys remplis d’excès, à leurs fans finis qui les suivent partout dans le monde. D’ailleurs, plusieurs fans étaient déjà sur le bord de la rampe dès 14 heures, et ils étaient clairement là pour leurs Cowboys préférés, ce qui ne les a pas empêchés de profiter pleinement de chacun des artistes qui sont passés devant eux (le plus comique, c’est qu’ils quittaient la scène Mile Ex à tour de rôle, pour ne pas perdre leur place). Enthousiasme et respect. Parle-moé de ça.

Le « vieux groupe des années 1990 » (ça rajeunit VRAIMENT personne) est toujours dans une forme resplendissante, Pauzé et Dupras sautent partout, Marie-Annick caresse encore son violon avec tendresse, à l’arrière, les deux batteurs (dont Pierre Fortin, qui a une maudite grosse soirée) s’en donnent à cœur joie. Et Karl Tremblay, le plus tranquille de la bande, chante toujours avec passion.

On s’est pas mal promené dans le répertoire du groupe, Pépère Jacques a reconnu pas mal de bons morceaux du bon vieux temps à travers les chansons d’Octobre qui le font un peu moins vibrer, l’âge vénérable aidant.

N’empêche que la réaction du public venu voir son groupe préféré est des plus contagieuses, on a trippé nous aussi. Parce que ce groupe-là, sur scène, est tellement généreux, on ne peut tout simplement pas refuser ce qu’il nous propose.

Une vraie grand-messe.

Galaxie

Tant qu’à être dans les groupes spécialistes de la communion, déplaçons-nous pour voir un groupe qu’on connaît très bien, notamment parce qu’on les voit souvent : Galaxie. Olivier Langevin et sa bande sont sur les derniers kilomètres de la tournée Super Lynx Deluxe, on a laissé les costumes à la maison, on fait juste s’amuser entre chums (qui incluent une bonne partie du parterre… y’avait pas mal d’accent du Lac là-dedans, on calcule que les Tremblay, les Gagnon et les Girard devaient former une bonne partie du public). On le répète, même si on a moins aimé les tounes de Super Lynx Deluxe sur disque, ici, sur scène, elles prennent un toute allure toute autre.

Langevin, comme d’habitude, est visiblement possédé par le Malin. Il se lance partout, au grand dam des photographes qui essaient de le suivre (ce qui amuse d’ailleurs beaucoup Langevin, qui s’est pas mal amusé à nous troller… pour ensuite en rire avec Fortin), il chante toujours avec la même énergie du désespoir, accompagné par la voix aérienne de Karine Pion, qui fait toute la différence! Jonathan Bigras se tient tranquille derrière ses bongos, et Pierre Fortin n’a pas l’air d’avoir drummé pendant une heure et demie avant le set. François Lafontaine, derrière ses claviers, a du fun, comme d’habitude, et Fred Fortin, ben… il joue sagement avec sa basse. Si les autres sont possédés par le Malin, on soupçonne Fortin d’ÊTRE le Malin.

En gros, on va juste vous rappeler que Galaxie est à L’Anti les 18 et 19 septembre prochains, que ça va être intime et magistral à la fois, pis que Laura Sauvage assurera la première partie.

A Tribe Called Red

Rien de mieux pour finir cette soirée qu’une séance de danse remplie d’énergie avec les gars d’A Tribe Called Red. Derrière les rythmes à la fois électroniques et tribaux balancés par les deux DJ, on peut voir sur l’écran plein de cas d’appropriation culturelle, façon assez subtile de nous rappeler, une fois de plus, où on est. Mais on en profite surtout pour danser, accompagner les danseurs habillés en costumes traditionnels qui mélangent les danses autochtones et hip-hop. C’est beau, c’est coloré, c’est vivifiant.

Malgré la fatigue, on aurait dansé encore plus longtemps.

Mais il restait encore une autre journée.

Ça se poursuit à la page suivante!

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