Paraît qu’il y avait le FME à la fin de semaine de la Fête du travail. J’dis « paraît » parce que pour une deuxième année consécutive, les mélomanes de Québec avaient le remède tout indiqué contre la FOMO (Fear of missing out, pour les gens de mon âge) : la FMQ (Fête de la musique de Québec) était de retour pour une deuxième édition pandémique de fin d’été, et oh boy qu’on a été gâtés!
Au menu, plus d’une trentaine d’artistes et de bands du Québec, mais surtout, de Québec, dans une grande variété de styles (mais avec un pas pire accent sur le rock). Des gars, mais aussi pas mal de filles. Des découvertes, des valeurs sûres et très peu de déceptions.
Évidemment, l’équipe d’ecoutedonc.ca était sur place toute la fin de semaine. On était quand même pas pour manquer ce bel événement qui parvient bon an mal an à en mettre plein les tympans des résidents du quartier St-Jean-Baptiste!
Restez avec nous, on vous parle de nos coups de coeur et on vous montre quelques-unes de nos plus belles photos!
FEUXDEFORÊT
Le quatuor FEUXDEFORÊT propose un rock expérimental qui emprunte un peu partout pour brûler les planches sur lequel il repose l’instant de faire exploser quelques cerveaux au parvis de l’église. Des riffs ravageurs, un saxophone baryton endiablé, une section rythmique pas mal groovy, le quatuor mené par Guillaume Tardif cuisine sa musique en ne suivant aucune recette et sonne comme une tonne de briques sur une scène. Même si la foule n’osait pas encore trop s’approcher de la scène (maudite hésitation pandémique), on pouvait voir pas mal de headbanging dans les marches. Attention, c’est chaud! (Jacques Boivin)
Renard Blanc
Quand on a vu Renard Blanc sur l’affiche de la FMQ, on savait qu’on allait finir notre vendredi en beauté. Le post-rock atmosphérique du trio maskoutain est juste parfait pour hocher doucement de la tête et se déhancher joyeusement. Vincent Lepage, Alexandre Crépeau et Julien Beaulieu ont pigé dans les pièces de leur triptyque Combustion/Abysse/Bérillium pour nous faire passer un bon moment. Un très bon moment, même. En show (comme sur disque), Renard Blanc ne fait jamais de surplace, chaque pièce est complètement différente de la suivante. Ça donne un genre de crescendo qui nous explose dans la face à la fin du show, après pas mal plus d’une demi-heure à en prendre plein la gueule. On a hâte aux prochains rendez-vous. (Jacques Boivin)
Loïc Lafrance
Il commence à peine, mais le jeune homme est vraiment à l’aise sur scène! Portant le veston le plus fleuri que j’ai vu en 2021, Loïc Lafrance a un petit côté très désinvolte fort attachant. Seul à la guitare et au micro, l’auteur-compositeur-interprète a défendu avec brio ses petites chansonnettes pleines de soleil et de désinvolture. Devant un public visiblement conquis d’avance (la FMQ est un événement où le BYOC – bring your own crowd – est fortement encouragé, surtout si vous restez une bonne partie de la journée), Lafrance avait l’air de s’amuser ferme, et nous aussi! Des fois, ça prend pas grand chose pour avoir du fun. Un peu de candeur, beaucoup de soleil, et des p’tites tounes qui te mettent un petit sourire dans la face.
En passant, nice reprise de Philippe Brach! (Jacques Boivin)
Aube
Quand on dit qu’on fait de belles découvertes à la Fête de la musique de Québec, en voilà un bel exemple. Aube n’a qu’un simple sur les Bandcamps, mais on y trouve pas mal tous les éléments pour tomber amoureux. La pop acoustique minimaliste de l’auteurice-compositeurice-interprète (qui chante dans la langue de Dylan) va droit au coeur, notamment en raison d’une voix incroyable, capable autant de douceur que d’intensité, appuyée par des mélodies planantes empreintes de mélancolie. Même le cul bien vissé sur ma chaise, je me sentais souvent en train de léviter, ce qui est généralement bon signe.
Voilà une personne qu’on va surveiller de près. (Jacques Boivin)
PasMort
Il y a longtemps qu’on attendait au Québec un groupe comme PasMort. Un gros punk-rock classique super ficelé, plein de riffs complexes et d’humour. Les quatre complices qui forment ce band de Rivière-du-Loup présentaient, non sans fierté, leur tout premier show hors-garage.
Cet aveu de première mondiale en a surpris plus d’un en raison du constat absolument sanctifiant de leur aisance sur les planches et de leur habileté à interagir avec les spectateurs. Les gars sont infiniment drôles. Leur répertoire original marquent les esprits. Grâce à des titres comme La Fée qui fume et Coloc Calzone (leur premier simple), on se rend vite compte que le sérieux réside dans la musique et non dans le propos — grâce à un narratif à la Bleu Jeans Bleu. Magistral. On leur souhaite de rester PasMort longtemps! (Karoline Boucher)
Charles Garant
Mettons une chose au clair immédiatement : Charles Garant est un diamant brut caché dans le roc. Ou un sédiment de mammouth enseveli sous la glace. Lorsqu’on découvre l’un ou l’autre, c’est l’apothéose.
Le jeune sweetheart est un multi-instrumentiste auteur-compositeur-interprète autodidacte. Sans qu’on ne crie gare, Charles écrit, compose, arrange, joue, chante et réalise tout seul un répertoire original anglo de fou dans son studio de Lévis. Le problème, c’est celui-là: personne n’a jamais crié gare…
Doté d’une voix à la Noel Gallagher, Charles s’est amusé à assommer son petit public avec ses chansons de rock alternatif contemporain, colorées des prémisses de GreenDay et de Sonic Youth. Le contenu brille de virtuosité, d’ambiances et de textures. Le son qui flottait au-dessus de la rue St-Jean a provoqué un agglutinement de curieux devant l’enceinte du Passage Olympia. Sans doute, ces curieux cherchaient-ils à valider la rumeur qui parvenait à leurs oreilles : la découverte d’un diamant brut caché dans le roc. (Karoline Boucher)
Mon amie Souffrance
Toute la fin de semaine, je me disais que j’allais éviter de parler des bands que j’ai déjà vus à la FMQ dans mes coups de coeur. Mais voilà, une autre prestation de Mon amie Souffrance exactement un an plus tard, à la même place et à la même heure, et je change mon fusil d’épaule. C’est parce que voyez-vous, Seb, Vinnie, D-Boy et Claudia (Gagné, nouvelle bassiste de feu de la bande) ont beau jouer assis, leurs pièces instrumentales décrassent les tympans tout en faisant vivre une kyrielle d’émotions. Pas trop loin du prog, pas mal proche du jazz dans le côté « approximatif » (crissement bien calculé pareil), on a droit à une demi-heure de musique qui s’adresse autant aux tripes qu’au cerveau, et c’est bien ainsi.
Une salve de rock purificateur à la puissance dix. (Jacques Boivin)
Malaimé Soleil
Si l’on pouvait faire un vox pop auprès des festivaliers qui ont pris part à la Fête de la Musique le weekend dernier, beaucoup d’entre eux déclareraient que Malaimé Soleil était le band à découvrir. De timide en début de prestation à déjantée à la toute fin, la foule est tombée en amour avec ce pop-rock alternatif franco — au point d’offrir en cadeau aux quatre membres médusés du band un bon vieux mosh-pit pré-pandémique. Oui, la preuve vaccinale était obligatoire pour franchir la scène du Parvis…
Le plaisir de découvrir l’univers de Malaimé Soleil se s’arrête pas à la force de leur musique. Il se manifeste aussi par la présence scénique. Les gars ont légitimement beaucoup de fun à jouer ensemble. La complicité se détecte dans leur énergie à-tout-casser sur scène. Puis leur candeur, trahie par l’émerveillement de jouer leur musique devant une foule réceptive, rend la proposition tout à fait séduisante. On a Bienaimé. (Karoline Boucher)
Palissade
Avez-vous déjà vu une foule changer en 15 minutes? C’est pas mal ça qui est arrivé avec Palissade et son post-punk aux accents new-wave-gothique-maudit-que-le-vieux-The Cure-me-manque-j’ai-envie-d’écouter-du-Front-242. Les chemises colorées du parterre ont rapidement été remplacées par des chandails noirs. Des chandails noirs partout. Et BEAUCOUP de têtes grisonnantes nostalgiques des nuits folles à danser au sous-sol de la Fourmi Atomik (ah, le bon vieux temps!). Visiblement nerveux pendant les premières minutes de la prestation, le trio composé de Thomas Denux-Parent, Catherine Roussel et Martin Labbé n’a vraiment pas pris de temps à se dégourdir devant l’enthousiasme de la foule, ce qui a incité les p’tits jeunes colorés à se pitcher au beau milieu des hommes et des femmes en noir pour danser sans lendemain. Probablement un des moments les plus rassembleurs de la fin de semaine. (Jacques Boivin)
Mélina Lequy
Une autre belle découverte, ici! L’autrice-compositrice-interprète Mélina Lequy, finaliste à Granby l’année dernière, ne réinvente peut-être pas la roue, mais elle écrit de saprées belles tounes. Seule à la guitare, elle a attiré les curieux et les curieuses un.e par un.e avec ses chansons à texte simples, mais efficaces, toutes interprétées avec conviction. C’est tout ce que ça prend à un coeur pour aimer. (Jacques Boivin)
Brunnemer
OK. Fait pas très beau. C’est gris. T’as besoin de soleil. Qu’est-ce que tu fais? T’invites Brunnemer à jouer son rock jazzé plein de soul (on appelle ça de la néo-soul, Jacques!). Y’a ici tout ce qu’il faut pour réchauffer la planète (de la bonne manière). L’artiste a une présence scénique qui déborde de l’étroit passage Olympia (ça dansait joyeusement sur St-Jean), ses chansons sont tout simplement chaudes et lumineuses, comme un après-midi de juillet au Festival de Jazz, et ses musiciens kickent des culs et bottent des derrières. On ajoute 25 points pour le #momentflûte. À (re)voir à La Ninkasi le 24 septembre prochain, alors que Brunnemer lancera Jazz is the new Triste. Chaud devant! (Jacques Boivin)
Félixe
À l’instar de la plupart des artistes à l’affiche à la Fête de la Musique, Félixe ne cachait pas sa joie de remonter sur scène après deux ans d’arrêt sans spectacles en personne et ce, malgré un début d’ascension très médiatisé cette année vers le firmament du rock alternatif féminin au Québec.
Avec ses guitares qu’elle empoigne d’une main de fer, Félixe a entretenu la dense foule dans un émerveillement grandissant au fil de sa prestation. L’artiste vêtue de blanc décline en 30 minutes des bijoux de pièces originales pimentées de grunge, d’alternatif et de pifs-pafs bien mesurés.
Félixe fait du bien et fait du sens. Même dans ses entre-tounes, son animation volatile et introspective saisit le mâche-patate. Chers amis, si vous cherchiez la preuve d’un avenir brillant du rock franco féminin au Québec, elle se trouvait au Passage Olympia samedi dernier. (Karoline Boucher)
Béluga
En juin dernier, Béluga, ou Louis-Solem Pérot pour les intimes, nous avait convié chez lui pour nous présenter son premier projet solo. On avait donc bien hâte d’entendre en live le produit de son identité musicale. C’est maintenant chose faite.
Béluga s’est affiché sur scène avec pour seuls éléments, son assurance et sa guitare. Son sourire apaisant et les étoiles dans ses yeux enlacent immédiatement les spectateurs. Les premiers accords de sa folk pop franco nous catapulte dans son univers d’air marin, de gratitude et de beauté sauvage, là où le public ne peut faire autrement que de décrocher un rêve.
Grâce au projet Béluga, Louis-Solem Pérot atteint le sommet de son art.
Dans l’un de ses titres, il chante: «Je partirai sur la grand route pour me chercher et je me retrouverai ». Clairement, la migration vers le solo a porté fruit. (Karoline Boucher)
Sarajevo et moi
Ce trio de Québec est en train de se tailler une place remarquable au sein de la sphère Dark Wave dont le retour en force du genre est propulsé par la nostalgie des années 80.
Des représentants de la Génération X, il y en avait à la pochetée samedi dernier sur le parvis. Parmi eux se rassemblaient également des Gen Z et des Milléniaux, attirés par la virtuose des claviers et le grandiose des tempos électrowaves, le tout mis en symbiose par la voix de fou de la chanteuse Juliette Décembre. Tout Fonctionne chez Sarajevo et Moi. Pour cause, le trio vaut absolument le détour.
Gab Paquet
Rien ne pouvait arrêter Gab Paquet de donner le concert que les membres de la section Capitale-Nationale de la Gab Nation méritaient. Les billets pour le spectacle se sont écoulés en quelques minutes, le parterre était plein de fans qui connaissaient toutes les chansons de « La force d’Éros » par coeur, et c’était pas la pluie qui menaçait de tomber une fois de plus qui allait nous empêcher de célébrer l’amour avec le chanteur de charme.
Celui-ci, plus en forme que jamais, a donné à ses fans une performance inoubliable. Costumes déjantés. Musique pop pleine d’amour. Pas de danse incessants. Et la pluie diluvienne qui s’est mise à tomber au beau milieu du show. Cette pluie, qui en aurait refroidi plus d’un, a plutôt fait l’effet d’un électrochoc sur Gab, sa bande de toujours excellents musiciens (les best) et la foule en délire. C’était Glastonbury sans la boue : humide en sacrement, mais beau à voir et à vivre.
Malgré la pluie (ou grâce à celle-ci, c’est selon), la Fête de la musique de Québec s’est terminée dans une apothéose digne des grands festivals.
Conclusion
Ouf, quelle belle fin de semaine! Tout avait été fait pour qu’on se sente bien. Ma première expérience de « j’te flashe mon passeport » s’est déroulée sans heurts. Le public a été cool, même s’il y a eu quelques débordements (on a besoin de nos moshpits, bon). La bière était bonne, les bands étaient super. Évidemment, on ne pouvait pas parler des trente quelque projets, ça aurait été interminable.
Mais d’autres groupes qu’on a vus méritent une petite mention : le stoner-rock d‘OVNIII était sur la coche. Le son de Ressak se peaufine à chaque fois que je les vois à la FMQ. Ça s’en vient vraiment, mais vraiment solide. Le barbershop féminin des D’Lovelies était charmant. Gawbé est une artiste fort prometteuse qu’on va surveiller de près. Sex Machine Octopus, qu’on a vu souvent ces dernières années, était égal à lui-même avec une performance déjantée qui a rassemblé les fans de Palissade et ceux de Malaimé Soleil. Les chansons tendres et imagées de Rosemary, qui ont retardé l’arrivée de la pluie. Le p’tit jazz sympa d’Equinoxe Trio. La musique belle à pleurer de Gabriel Newlands. L’indie rock aux accents grunge (même en formule solo acoustique) de Worry. La chaleur jazzée de Neat Summa Orchestra (avec une petite visite de Brunnemer en prime). La transformation du parvis en piste de danse par Millimetrik. Et on en oublie, parce qu’on a vu tellement de beau monde…
On a déjà hâte à l’an prochain. En juin. Va falloir soulager son FME FOMO d’une autre manière, mais c’est clair qu’on va s’en mettre plein les oreilles au parvis une fois de plus.