Depuis quelques années, la scène émergente de Québec a pu voir évoluer Pascal Larose. Que ce soit au côté de L i l a ou encore de Lane, celui-ci était toutefois assez discret. Aujourd’hui, impossible de passer inaperçu. Voici en exclusivité Le grand frette, son premier mini-album.
Pascal a longuement hésité avant de se lancer. Comme plusieurs mélomanes, il était en quête d’un son qui se différencie de ce qui existe déjà, à la hauteur de ce qu’il veut faire. « J’ai écouté les Beatles énormément et plein d’autres artistes qui ont fait des pièces tellement incroyables. Tu te dis : pourquoi les gens iraient écouter mes tounes un peu croches quand ils ont l’option d’écouter le catalogue des Beatles ou de l’Angleterre au complet! »
Le grand frette
Le travail minutieux de Pascal résulte de nombreuses influences et ce, depuis son jeune âge. Au téléphone, celui-ci me raconte que lorsqu’il avait neuf ans, sa mère avait acheté l’album Love. Sur cette trame sonore du Cirque du Soleil, chaque pièce des Beatles a été repensée avec génie. « Ils ont eu accès aux enregistrements originaux de chaque instrument séparé. Ils ont réussi à coller des solos de guitare d’une pièce dans une autre et à coller des segments de leurs dernières chansons avec celles de leur début. Dans Because (qui est en surround) t’as un Beatles dans chaque coin de la pièce qui te chante sa partie. C’est magnifique. »
Le mixage hors pair proposé sur Love a très certainement contribué à façonner l’artiste que Pascal est aujourd’hui et tout particulièrement à peaufiner sa démarche en studio. Sur le EP Le grand frette, les pistes sont nombreuses et présentent des instruments majoritairement organiques ainsi que des sons ambiants. « Tsé ça ne paraît pas, mais y’a une centaine de pistes audio sur (la pièce) Le grand frette, d’instruments différents ou qui doublent des sections. Si tu n’as rien à faire prochainement, écoute la chanson pis note le nombre d’instruments différents que tu entends. Tu me diras tu arrives à combien. » Je suis forcée d’avouer que je n’arriverais pas à relever le défi, et vous? Si plusieurs des instruments sont joués par Pascal lui-même, il peut compter sur l’aide de précieux collaborateurs notamment pour les cordes et les cuivres. Ainsi, on peut entendre du violon, de la contrebasse, de la harpe, du banjo, des bongos, du saxophone et tellement plus!
La richesse des différents instruments n’est pas tout! On retrouve également une variété dans les styles. Sur Chill sur Netflix, la sonorité moderne des claviers se juxtapose au jazz des années 30. On pourrait presque s’imaginer siroter un scotch en pleine prohibition! « Je faisais de l’insomnie une nuit et je me suis mis à écouter une série sur Netflix. Pendant un segment, j’entendais en background un quartet de voix de Doo Wop qui chantait en harmonie style Barbershop. » C’est donc comme ça, au beau milieu de la nuit, que Pascal a enregistré les bases de cette pièce. « C’est souvent comme ça que j’écris de la musique, j’entends quelque chose et je me demande si je suis capable de faire ça. Au début, je n’étais pas totalement satisfait dans la pièce parce que ça ne sonnait pas totalement rétro, mais ça ne sonnait pas vraiment moderne non plus. Je ne savais pas comment rendre ça intéressant aujourd’hui parce que si ça sonne juste comme une vieille toune, mais que ça n’amène rien de nouveau, je ne sais pas où est l’intérêt. Y’en a plein de bonnes tounes qui sont faites dans un style rétro, mais je pense que ce qui est vraiment le fun, c’est de rester surpris d’entendre quelque chose. »
Ce contraste entre le passé et le présent est également mis de l’avant dans Chartrand. Musicalement, le titre se présente comme une épatante fusion entre la musique des films d’horreur des années 80 et les airs baroques du 17e siècle. « Le piano est très classique, mais c’est surtout le clavecin qui fait baroque. La guitare qui embarque par la suite est très surf et la vibe générale de la pièce est inspirée des films de John Carpenter (Halloween). Il enregistrait lui-même sa musique et utilisait des gros synthétiseurs. C’était impressionnant!» Pour ajouter à la ferveur de la pièce, les chants laissent place au discours engagé du syndicaliste et militant socialiste Michel Chartrand, un ajout qui s’est un peu imposé de lui-même. « Je voulais trouver des paroles, mais je n’ai jamais su trouver quoi dire sur cette musique-là. C’était un casse-tête de trouver quoi faire avec pis j’ai eu un flash. Je me suis mis à chercher des entrevues du début de la déclaration de guerre. J’avais envie d’avoir de quoi de québécois, parce que j’aime le français, que j’aime le Québec et que je trouve qu’on a une culture qu’on peut approfondir. J’ai cherché des textes de René Lévesque pis c’est mon coloc qui est tombé sur ce rallye syndical là. J’ai pratiquement juste mis l’extrait au début de ma trame et tout tombait pile-poil. » Sur l’enregistrement, Chartrand énumère différents abus subis par le peuple. En juxtaposition avec ces mots, la pièce de Pascal est percutante, puissante.
Le grand frette c’est donc ça. C’est une déconstruction des structures classiques qui défie le prévisible. C’est une abondance de sonorités sans en devenir hétéroclite. C’est un brassage de cage qui nous fait sortir de cet état frigorifiant qui nous paralyse et qui nous empêche d’avancer. Ce EP, c’est le fruit du travail minutieux d’un Pascal Larose désireux d’offrir au monde quelque chose de différent, de surprenant.
La sortie sur les plateformes est prévue pour le 15 avril prochain. D’ici là, c’est ici-bas que ça se passe! Bonne écoute. (Lien de pré-sauvegarde juste ici).