Aaaaaaah, les Nuits FEQ. Le genre de soirées où pour 15 $, tu peux voir trois bands qui te demanderaient normalement 15 $ chacun pour aller les voir. Des bands qu’on voit plus souvent qu’autrement dans des bars (sauf peut-être la tête d’affiche, qui est généralement rendue assez connue pour se farcir des grandes salles) et qui sont donc inaccessibles pour les mineurs. Des soirées propices à la découverte, mais on va vous l’avouer bien franchement, on a comme une relation amour-haine avec ces soirées qui tiennent autant de l’événement où on se montre sur les Instagrams que de l’occasion de découvrir quelques-uns des projets les plus prometteurs du moment.
Cette Nuit FEQ du 23 novembre dernier s’est vendue très rapidement, et pour cause : la tête d’affiche était le chouchou de l’heure, qui fait sensation partout où il passe : Les Louanges. Après un été plus que chargé à arpenter presque toutes les scènes festivalières du Québec (on l’a nous-mêmes croisé 3-4 fois), il faisait bon de revenir dans sa région natale, jouer devant sa famille et ses amis d’enfance et ses fans de la première heure qui se souviennent encore de shows au cégep ou dans un Cercle pas très plein.
Faut dire que Les Louanges avait de quoi célébrer : La nuit est une panthère a été célébré partout, même dans le reste du Canada, où l’album s’est retrouvé parmi les dix finalistes du prix Polaris 2019, et le maxi Expansion Pack a fait le bonheur des fans qui sont de plus en plus nombreux à apprécier la pop teintée de hip-hop et de jazz de Vincent Roberge et ses complices (notamment Félix Petit, qui a aidé Roberge à peaufiner ses tounes et à trouver ce son archi-urbain qui fait fureur dans les banlieues).
Je me préparais à écrire ce show-là sur le pilote automatique, mais on pense que Roberge, comme ses fans qui l’ont vu à de nombreuses reprises, avait envie de rebrasser les cartes. Le programme a changé, il suit une courbe beaucoup plus naturelle, ça commence fort, on reprend un peu notre souffle avant de finir sur les chapeaux de roues, comme il se doit.
Au fil du temps, Roberge est devenu toute une bête de scène : il sait comment déclencher des réactions avec un simple déhanchement, un simple regard, ou un simple commentaire. Toujours classe et de bon goût, on l’imagine même s’excuser en chuchotant quand il passe en body surfing sur la foule pendant Tercel.
On a rarement autant entendu le monde chanter autant à l’unisson dans une salle, sauf peut-être quand Émile Bilodeau y est… bon, on aurait envie de dire que c’est pas mal le même genre de phénomène. Un jeune cool et branché, mais avec une vieille âme rassembleuse qui touche les préoccupations d’une génération entière. On le voit bien, là, avec un paquet de jeunes adultes qui chantent avec Roberge avec un grand sourire. La banlieue de Vincent, c’est la leur, c’est leur réalité, leurs souvenirs du secondaire, leurs difficultés amoureuses, leurs envies, leurs craintes, leurs peines.
Et la musique, elle? Ben c’est aussi la leur. Le groupe incroyable qui accompagne Roberge à chacune de ses sorties a ses racines dans le hip-hop, dans le jazz et dans le rock, et comme ben des jeunes de leur génération, on n’hésite pas à faire de nouvelles sonorités le fun en mélangeant le tout. Un mélange doux et entraînant à la fois qui ne laisse personne indifférent.
Les Louanges sont de retour 28 février prochain, toujours à l’Impérial Bell. Et ça va encore être plein, alors ne perdez pas trop de temps à acheter vos billets.
Choses sauvages
Un autre groupe qu’on a beaucoup vu cette année (à notre plus grand plaisir), c’est Choses sauvages. La formation menée par le rachitique chanteur-flûtiste Félix Bélisle a su fermer la trappe des personnes qui avaient oublié qu’elles étaient à un show plutôt qu’à l’agora du cégep avec son rock trop funky et groovy pour rester là à rien faire. On a vu ce groupe-là évoluer sous nos yeux ces dernières années, et c’est fou de voir combien Bélisle est devenu lui aussi une bête de scène alors qu’il était plutôt timide à ses débuts.
C’est une bonne chose, parce qu’une fois que le groupe a capté l’attention du public avec ses grooves chics, Bélisle n’a qu’à se déhancher avec passion (et sa flûte traversière) pour faire entrer le public dans une transe dansante qui pourrait ne jamais finir si on laissait le groupe jouer toute la nuit.
On a bien sûr entendu de nombreux morceaux de l’excellent album homonyme (dont la toujours aussi jouissive La valse des trottoirs), mais on a aussi pu danser sur le single le plus dansant de votre année 2019, Apophis.
L’entièreté de la zone médias de l’Impérial dansait joyeusement, mesdames et messieurs!
Laurence-Anne
On vous le dit depuis le début de l’année, si y’a une artiste à surveiller au cours des prochaines années, c’est bien Laurence-Anne, qui a beaucoup impressionné avec son album Première apparition. On avait hâte de voir la jeune femme et son groupe faire un retour à l’Impérial (on l’avait vue en première partie de Safia Nolin, où elle avait fait le plein de nouveaux fans curieux… et attentifs), mais on avait peur que la foule peu disciplinée qui caractérise parfois les Nuits FEQ soit peu réceptive, parce que trop occupée à papoter au lieu d’écouter.
C’est un peu ça qui s’est produit, et ça nous désole un peu… parce que sur scène, Laurence-Anne mettait le paquet en comptant sur ses morceaux les plus entraînants plutôt que les morceaux qui demandaient une écoute assidue. Oui, c’est riche et complexe, oui, c’était un brin différent du reste de la soirée (beaucoup plus dansante), mais du côté de la qualité, c’était aussi bon que ce qui suivait. Y’a quelque chose d’unique dans la pop-rock fruitée de Laurence-Anne (qui a su trouver un son bien a elle, qui se démarque de ses plus en plus nombreuses collègues), un petit quelque chose de pétillant même si parfois, c’est pas toujours lumineux. Un genre de légèreté qui fait du bien dans cette période triste de l’année.
Peut-être que les petits problèmes de son (on sent que l’équilibrage avait été fait en fonction des Louanges, on cherchait le groove, ce qui est pas mal moins dans le registre de Laurence-Anne) n’ont pas aidé, mais on aurait aimé une écoute plus attentive pour cette première partie. Peut-être aussi qu’on a du mal à entrer dans la bulle (parfois étanche) des musiciens sur scène, qui ont énormément de plaisir (ça se voit et ça s’entend) et qui partagent ce plaisir entre eux, mais il faudrait peut-être juste que ce courant se rende sur le parterre.
On va sûrement avoir l’occasion de se reprendre, entre fans finis de la jeune femme, parce que malgré tout, y’avait beaucoup de monde qui connaissaient les chansons de Laurence-Anne par coeur dans la salle. On le sait, on vous a vu réciter doucement les paroles d’Instant zéro comme nous!