C’est un des secrets les moins bien gardés de Québec : la série Croissants musique du Grand Théâtre de Québec permet de découvrir de nombreux.ses artistes émergent.es à une heure où plusieurs d’entre nous dorment encore après un samedi passé dans une salle sombre à rocker nos vies.
Le 4 février dernier, c’est avec l’artiste multidisciplinaire de Mashteuiatsh Soleil Launière que votre pas très humble serviteur et sa copine pekuakamilnu avaient rendez-vous. Une date qu’on ne voulait surtout pas manquer, car « Taueu », l’album de Soleil paru en 2023, a figuré dans notre palmarès des albums préférés de l’année.
On arrive donc tôt, question d’avoir une bonne place, mais la route du foyer de la salle Louis-Fréchette nous est encore bloqué parce que les tests de son ne sont pas encore terminés. Le temps passe… et passe… on finit par nous avertir qu’en raison de problèmes techniques, on doit commencer un peu plus tard.
Lorsque le gérant des salles du Grand Théâtre nous laisse enfin entrer, on comprend assez vite ce qui s’est passé : au lieu de ses claviers habituels, Chloé Lacasse (une des deux claviéristes et choristes du band) doit jouer sur un piano à queue. Ah, l’électronique!
Le spectacle a donc dû être adapté à cette nouvelle réalité, une formule presque acoustique qui n’a jamais été… pratiquée! On nous demande donc d’être indulgent.es, une demande superflue, vu la qualité du spectacle qu’on a eu.
Soleil et ses musicien.nes (Chloé Lacasse – piano et voix – Geneviève Toupin – claviers, guitare acoustique et voix – et Vincent Carré – percussions, qui ensemblent forment la formation Willows, ainsi que Simon Walls aux diverses guitares) arrivent et se lancent sans trop attendre avec Pimiteu, la même pièce qui ouvre l’album de belle façon.
Ce « chant autochtone » (terme galvaudé s’il en est un) ne sera pas tout à fait la norme en cette matinée, car même si l’autrice-compositrice chante une grande partie de ses chansons en innu-aimun, elle semble avoir un faible pour les sonorités pop et soul. Sous cette formule un peu particulière, des pièces comme Two Spirit se transforment en morceaux un brin jazz, et c’est vraiment intéressant, surtout quand on a déjà vu le spectacle normal…
Pendant que Vincent Carré tape sur ses peaux comme si sa vie en dépendait, Simon Walls caresse tendrement sa guitare ou sa lap-steel. De leur côté, Geneviève Toupin, habituée d’être drette en face de Chloé Lacasse, regarde un peu moins que d’habitude dans sa direction (ce qui est tout à fait compréhensible – la pianiste se concentrait sur ses partitions – mais on a quand même eu un beau moment piano à quatre mains). Pendant ce temps, Soleil Launière chante, danse, sourit, se laisse prendre par cette ambiance particulère. C’est vraiment beau à voir.
Sincèrement, si on nous avait rien dit à part un laconique « hey, on essaie une nouvelle formule ce midi », on n’aurait jamais cru qu’il avait fallu se revirer sur un dix cennes et que ce show-là n’avait jamais été pratiqué! Même que si les artistes voulaient un jour donner un deuxième souffle à cette tournée, cette formule irait de soi (on vous avertit toutefois, pensez pas qu’il y a un piano à queue au QG du Phoque OFF pour le cocktail d’ouverture, gang!). Ça témoigne de leur grand talent et de leur expérience.
Pendant près d’une heure, on s’est fait bercer par des musiques qui nous rappelaient tantôt la grande ville, tantôt le majestueux Pekuakami. C’est d’ailleurs le titre de la dernière pièce, qui parle avec amour de ce que les allochtones appellent le Lac Saint-Jean. Copinette à côté de moi serrait ma main très fort, c’est rare qu’on chante ses racines de si belle façon. Pis j’vous avoue que cette pièce aux accents folk donne le goût de brailler, même si vous en comprenez pas un mot.
Somme toute, c’était une maudite belle matinée. Comme on l’a mentionné un peu plus haut, on a une nouvelle date avec Soleil et ses acolytes pendant le Phoque OFF (mais si vous n’êtes pas un.e professionnel.le de l’industrie, malheureusement, vous ne pourrez pas y assister), et j’ai tout à coup encore plus hâte. Ne serait-ce que parce que je vais voir deux shows différents en une dizaine de jours.
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