Mathieu Bérubé – « Roman-savon »

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Photo (pochette) : Marie-Pier Meilleur

Grosse sortie. C’est ce qu’on a envie de dire après une première écoute du nouvel album de Mathieu Bérubé, le bien nommé Roman-savon, digne successeur de l’excellent Saudade, qu’il nous avait offert il y a quelques lunes de ça.

Mathieu a passé une longue année et demie à travailler sur ce nouvel opus, accompagné d’Antoine Corriveau à la réalisation et entouré d’une solide équipe de musiciens (Stéphane Bergeron, Cédric Martel, Simon Piché-Castonguay, Mélanie Venditti, Julie Boivin, Marianne Houle, Martin Lizotte, Étienne Côté, Catherine Leduc, Jérôme Dupuis-Cloutier, Elyze Venne-Deshaies et Alexandre Larin… tu les prends tous dans ta team, cré moé). Le résultat, c’est cette récolte généreuse, cet univers cinématographique un brin mélo qui cadre si bien avec le titre de cet album.

Ici, Mathieu a créé onze pièces, qu’on peut voir comme des chansons ou des pièces du manoir d’une famille pleine aux as, mais déchirée, qu’on pouvait voir à la télé l’après-midi. Tout en maintenant un fil conducteur dans son propos et dans son style, le jeune auteur-compositeur-interprète a peint chaque morceau de Roman-savon d’une couleur vive différente.

Sur Ulrica, on sent très bien pourquoi Mathieu est allé chercher Antoine pour l’aider à mener ce projet à bien. Ça prenait quelqu’un un peu comme lui, qui ne lésine pas sur la richesse et la qualité des arrangements. Y’a un peu de tout là-dessus, mais on évite la cacophonie en dosant savamment chacun des instruments. Suit l’irrésistible Elle et moi, une petite pop-rock sortie tout droit des années 1970, au rythme fichtrement groovy et à la mélodie ma foi fort accrocheuse. Le mélange de cordes, de claviers et de cuivres rend le tout juste assez fromagé, j’pensais pas dire ça, mais j’ai eu envie de danser.

Je ne nommerai pas toutes les tounes, elles sont trop belles, mais on ne peut pas passer sous silence la magistrale La soudure, une chanson qui foisonne tant du côté de la musique que de celui de la poésie :

déboucle ma ceinture 
laisse-moi tomber à l’eau 
érode mes blessures 
c’est la mise à niveau 
embrase ma peau embrasse mes os 
on reprend la soudure 

Mathieu Bérubé – La soudure

Une des chansons les plus toutes nues (malgré les jolis arrangements – une fois de plus) de l’album, Sainte-Cécile, révèle un peu mieux le côté un peu crooner de ce grand romantique (comme l’illustre si bien la pochette de l’album, captée par Marie-Pier Meilleur). Avec sa voix suave, Mathieu nous chante « l’annonce des ébauches des ébats / qui profanent le doigté d’une croix sur un front » d’une manière doucement mélancolique. Même moé, j’ai envie de danser un slow avec juste pour qu’il me susurre ces mots à l’oreille!

Un roman-savon ne se respectait pas sans une chute mélodramatique et c’est ce que Mathieu nous offre avec la très sombre L’âge d’or, qu’on écoute en se demandant qui il a déçu aussi fort, notre pauvre grand garçon.

Roman-savon n’est pas un album facile. Ça m’a pris quelques écoutes avant de vraiment apprécier tout le travail qu’on trouve ici. L’album a été un travail de longue haleine, et ça paraît. J’avoue que parfois, on peut aller se perdre dans des détails et devoir reculer la chanson parce qu’on a un peu perdu le fil, parce qu’il y a énormément à digérer. Mais après quelques écoutes, une fois qu’on a bien enregistré la trame générale de Roman-savon dans nos caboches, on apprécie de plus en plus ces petits détails, qui viennent ajouter un peu de punch ou quelques frissons juste au bon moment. L’apport d’Antoine Corriveau, qui aime ça quand ça foisonne de partout, tant que ça foisonne pour les bonnes raisons, y est sûrement pour quelque chose, bien que si vous avez déjà écouté Saudade, vous savez que Mathieu aime ça complexe lui itou.

Alors allez-y, prenez votre temps. Ça vaut la peine, je vous le jure!

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