Ce 3 mai s’est déroulé la deuxième nuit du festival des nuits psychédéliques au Pantoum. Pour ses 10 ans les organisateurs nous convient à des groupes très éclectiques : The Ladysmiths, Motherhood et Hot Garbage. Un plateau qui se dévoile très expérimental et qui nous tient en haleine tout au long de la soirée. Ce vendredi, la foule est au rendez-vous.
The Ladysmiths
Sans préavis, arrive sur scène la formation de la basse-ville The Ladysmiths. Les musiciens sont accoutrés de leurs plus beaux colifichets. Avec beaucoup d’humour et de provocation, le groupe nous livre une version massacrée de Smells Like Teen Spirit, : la glace est brisée. Le ton est donné. Ce groupe récent est composé de Charlie Lemay (chant), Thierry Gagnon (guitare), Alex Lapointe (batterie) et Allen Lapointe (bassiste). Leur look est à l’image de leur musique, un mélange audacieux entre le grunge des années 1990 et le glam des années 1980. Un peu comme si Guns N’ Roses rencontrait Boston. Non, l’époque des moustaches à la « Magnum », pads bouclés, chapeaux haut de forme et mini-shorts n’est pas révolue. Attachez vos tuques avec de la broche car le groupe a de l’énergie fucking rock’n’roll à revendre.
La pièce Ladyboy témoigne justement de cette énergie électrisante. Charlie en profite pour se baigner et s’imprégner de la sueur du public. Une belle claque pour moi qui me permets de faire le parallèle avec la fougue des Libertines aussi bien en termes de jeu de scène que d’intensité musicale.
La chanson Won’t be around n’est pas sans rappeler cette similitude et nous catapulte plus loin dans l’univers du rock des années 1990 avec une intensité brute qui ne faiblit pas. J’apprécie vraiment la fougue du groupe et particulièrement de Charlie. Il nous entraîne dans son rythme effréné, incarnant ainsi l’essence même du rock ‘n roll pur et dur. La dernière chanson clôt le spectacle sur une note plus envoûtante et nostalgique qui n’est pas sans rappeler les riffs de Brian Jonestown Massacre. Encore une fois le voyage temporel est très agréable.
The Ladysmiths est ma surprise de la soirée, ce groupe ne fait pas dans la demi-mesure et offre au public une expérience musicale aussi authentique qu’explosive où les décibels résonnent et les émotions s’enflamment.
Motherhood
Motherhood est un trio néo-brunswickois composé de Brydon Crain (guitare, chant), Penelope Stevens (basse, claviers, chant) ainsi que Adam Sipkema (batterie). Leurs mélodies sont une fusion captivante de ballades pop-rock et de math rock/post-punk et sont magnifiquement rythmées par la dualité saisissante des voix masculine et féminine.
Le spectacle est à peine commencé que la formation nous entraîne dans un tourbillon psycho-punk. Pendant une improvisation très fortement imprégnée de distorsion, la batterie maintient un rythme martelé tandis que la basse, omniprésente, pulse les basses fréquences dans nos veines afin de mieux nous faire hérisser le poil. L’exercice n’est pas sans rappeler The Evens (Groupe de Ian McKaye fondateur de Fugazi et Minor Threat) et résonne longtemps dans l’atmosphère de la salle du Pantoum
Les premières notes de Bird Chirp retentissent et le ver d’oreille s’installe dans ma tête. La chanson tirée de leur précédent album est effectivement très accrocheuse malgré la structure magnifiquement déconstruite. On pourrait la qualifier de balade enfantine post-punk (rien de moins).
Crawly I brasse la cage pour de bon, incitant le public à se lancer dans un moshpit endiablé, transformant le concert en une expérience punk intense. Dans la même lignée, s’ensuit une reprise de Bad Brains qui met aussi le feu au parterre. Les Ladysmiths en profitent d’ailleurs pour semer le chaos dans la foule en délire.
Les derniers morceaux nous transportent dans l’univers explosif des premières années des Pixies, avec un Brydon et une Penelope qui n’ont rien à envier aux Frank et Kim de ce monde. Pour leur dernier titre, Handbrake, l’ambiance commence sur une ballade pop, vire en expérience stoner, puis éclate en un punk énergique. Vous l’avez compris, Motherhood refuse toute catégorisation, affirmant leur originalité sur la scène musicale émergente. Le groupe ne se contente pas de sortir des sentiers battus, il le fait avec une énergie transcendante et résolument punk. Je vous conseille vivement l’écoute de l’album « Winded » si vous n’avez pas l’occasion de les voir.
Hot Garbage
La soirée se clôt avec le quatuor torontois Hot Garbage signé sur le fameux label Mothland et composé d’Alessandro Carlevaris (guitare, voix), Juliana Carlevaris (basse, voix), Dylan Gamble (claviers) et Mark Henein (batterie). Il est difficile d’apposer une étiquette à la formation mais on ressent dès les premières notes du morceau Ride les influences du Krautrock et rock psychédélique des années 1970. Ce préambule annonce un voyage intense dans les méandres du rock expérimental.
Durant Look At My Phone, des tonalités fuzz distorsionnées sur la réverbération dominent, plongeant le spectateur dans un univers aux rythmes déconstruits et de chaos grunge/noise. Une fois de plus ce soir, la bassiste se révèle être un pilier essentiel de la formation (surtout que Juliana prend la peine de s’exprimer en français durant les interludes) tandis que les claviers mettent en valeur ce joyeux chaos avec une maîtrise remarquable.
Hot Garbage nous offre une expérience musicale résolument originale, où chaque morceau est une exploration en soi, une plongée dans l’abîme de leur créativité débordante. Dans leur univers, la frontière entre le réel et l’imaginaire s’efface, laissant place à un tourbillon d’émotions et de sonorités hypnotiques. La pièce Mystic Muffin jouée à la toute fin du spectacle, témoigne de cette ambiance envoutante. Ce soir Hot Garbage a redonné les lettres d’honneur au mot « psychédélique » au festival (n’en déplaise aux amateurs de gros rock) et ça fait du bien.
Galerie photos