La faune – « Demain c’était hier »

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La Faune, c’est le nouveau projet de Jérémie Essiambre. Si les grands mélomanes reconnaissent ce nom, c’est qu’il est connu pour ses collaborations avec Cosmophone, Marie-Ève Roy, Lucill, Mudie (Hugo), Claudelle, Mégane Cyr, Jeffrey Piton, Kayta et Sara Danielle. C’est d’ailleurs en travaillant avec eux qu’a tranquillement pris forme dans son esprit Demain c’était hier, un long-jeu qu’il a lui-même enregistré au studio Malamute.

Le résultat se dévoile en un son pop alternatif, à mi-chemin entre la pop commerciale et le son plus raffiné de la pop émergente. On s’y amuse avec les différentes sphères musicales pour nous remplir les oreilles, nous stimuler l’âme, en camouflant dans l’arrière-plan de ses riffs de guitare plusieurs sons organiques et électroniques qui appuient ses pièces et les enrichissent. Il en résulte la trame sonore parfaite du petit-déjeuner-petites-patates que l’on cuisine au lendemain d’une nuit d’amour. Assez de feutre pour l’ambiance, mais assez de punch pour se réveiller.

Pourtant, si on prend le temps d’étudier les paroles, elles n’ont rien d’un déjeuner romantique. La majorité des textes sont écrits à la deuxième personne du singulier, mais impossible de dire à qui l’auteur s’adresse. Est-ce volontaire de sa part que de laisser ce flou dans sa plume? Dans tous les cas, on en comprend l’urgence de vivre, de la surcharge de nos quotidiens, d’une déconnection émotionnelle qui nous rend Ininflammable, qui nous donne peut-être même la peur des hauteurs.

Au-dessus des foules qu’est-ce que t’auras à crier? 
Si t’entends pas d’écho vas-tu paniquer? 
Si l’horizon est vide vas-tu tituber? 
As-tu peur des hauteurs? As-tu peur? 

Peur des hauteurs

Sur les médias sociaux, on parle de l’album comme étant le reflet du contemporain d’Essiambre. Et comment perçoit-il cette époque? Une chose est certaine, on en comprend un univers émotif en effervescence s’opposant à une génération qui tente de rester forte alors que tout passe trop vite. Comme si demain c’était déjà hier.

Tu nous trouves un peu drôle, monté sur nos grands chevaux.
Et toi groundé, les deux pieds sur la terre, stable et fier.

Volcan

Si on regarde le contenant littéraire sans son contenu, on trouve un style simple et épuré. Un style qui raconte, sans trop d’artifices linguistiques, mais qui n’en est pas moins efficace! Les mots touchent avec justesse. Portée par une voix juste et réconfortante ne se cachant pas derrière une surdose d’effets, la prononciation y est suffisamment claire pour en saisir les paroles. 

Demain c’était hier, c’est de belles collaborations. Bien qu’il ait joué presque tous les instruments en enregistrement studio, soulignons la participation de la violoncelliste Catherine Laurin qui supporte sublimement le multi-instrumentiste de ses cordes sur la pièce Cent ans. 

Inspirée d’une photo prise par Jonathan Arseneault, la pochette de l’album, réalisée par Ana Aleksov, présente Essiambre dans un style anime aesthetic qui rappelle les animations japonaises des années 80. On y reconnait bien l’œuvre de l’artiste par sa palette de roses et de bleus. Sur Facebook, La Faune s’est d’ailleurs amusé à révéler la pochette en fragments, accompagnés chaque fois d’un extrait. Neuf fractions d’images pour neuf chansons présentées sur neuf jours.

En résumé, du contenu à son emballage, la totalité de ce premier album est magnifique. Pas de superflu, pas d’artifices inutiles. De la simplicité juste et pure appuyée de subtilités auditives. Du réconfort qui surprend dans une vie qui va juste trop vite. La Faune commence donc en force et laisse l’auditeur en attente d’une suite. Avec suffisamment de peaufinage, on pourrait peut-être y voir évoluer demain un projet qui ne restera pas d’hier.

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