Chocolat – « Jazz engagé »

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Il serait facile de résumer cette critique en une seule ligne tirée de la première de deux introductions de ce nouveau (et inattendu) Chocolat : « j’suis totally mind blown » chante Hunt à pleins poumons! C’est exactement le sentiment qui reste à la fin de ce joyeux bordel sonore.

Pourtant, le premier simple aux allures disco Fou fou mon minou annonçait un album dominé par les claviers, ce qui n’est finalement pas le cas. Jimmy Hunt, autoproclamé ceinture d’or en poésie, présente Jazz Engagé avec ses fidèles complices habituels chez Chocolat. C’est un disque qui débute avec des allures d’album-concept, mais qui n’en sera pas vraiment un au final.

Après les 2 chansons qui font office d’introduction, dont la divertissante Une introduction inutilement complexe, Bonjour chocolat est la première véritable pièce,et elle offre un mélange des genres quelque part entre le prog et le funk. Cette fois c’est la bonne baigne dans le rock n’roll, plongeant l’auditeur dans un monde dystopique où les bons groupes de musique vendraient des albums par milliers: « 1,2,3,4,5,6,7,8 millions de copies, ayoye ». So sorry plaira assurément aux disciples du grand disque Maladie d’amour, album solo phare du leader de Chocolat. L’élégante mélodie de piano et les superpositions efficaces de claviers confèrent à la chanson une atmosphère intimiste tout en se moquant des conspirationnistes. Être un artiste poursuit dans la même veine avec ses « il faut rester cool » répété ad nauseam. Puis on questionne l’auditeur dans Jazz engagé sur un fond de musique tout droit tiré des vieux films de détectives. Mélanie et Médium, deux des nombreuses pièces qui se concluent sous la barre des 2 minutes, montrent bien toute la variété sur cet album. La première relate des expériences d’enfance, le texte simple étant supporté par une mélodie spécialement vaporeuse alors que la seconde est un petit brûlot punk; un côté râpeux que l’on ne connaît pas à Chocolat de façon générale. Hunt inflige plus tard une droite bien sentie à Gene Simmons, ce membre de Kiss qui a voulu mettre un trademark sur le mythique signe de «devil»! Dans un hymne heavy métal à la sauce Motorhead, le refrain culmine avec un « Ostie d’asshole, devil c’ta tout le monde » bien senti. Puis il y a Moutarde choux / Beurre de pin / Meilleur ami qui synthétise en une seule chanson la carrière musicale complète de Jimmy Hunt, en plus de changer à jamais notre vision des hot-dogs steamés. Et le jazz dans tout ça? Il se présente finalement lors de la dernière pièce Merci, conclusion d’un album audacieux et efficace. Un véritable plaisir.

Il y a bien quelques soulèvements de sourcils ici et là (R.D Ousqueté ou Les réseaux sociaux), mais dans l’ensemble il y a une curieuse cohésion dans ce florilège de pièces. Chocolat offre une agréable surprise de fin d’année qui sera probablement le meilleur disque rock (et disco-jazz-punk-rétro-prog) de cette année. J’ai parlé beaucoup de Hunt qui vole un peu la vedette par son sens du punch et son efficacité. Il faut dire qu’il livre ici une performance sans faille avec beaucoup d’humour, d’autodérision (on pense à la chanson Heavy entre autre) et une poésie crue et assumée. Il est cependant essentiel de mentionner le travail colossal d’Emmanuel Ethier à la réalisation (et aux guitares) qui réussit à faire tenir tout ça ensemble. Il faut dire que l’album a été enregistré dans 4 studios différents avec des coproducteurs différents, dont Guillaume Chiasson (Ponctuation), Julien Mineau (Malajube), Warren Spicer (Plants & Animals) et Dominic Vanchesteing. Bref, joli tour de force.

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