On vous l’a déjà dit, un des trucs qu’on préfère de la programmation du Pantoum, c’est sa manie de rassembler des artistes qui ont peu de choses en commun pour créer des soirées pleines de surprises et de belles rencontres. On prend deux projets qui vont dans deux directions différentes, on réunit sous un même plafond deux publics qui se croisent rarement (sauf au Pantoum, bien sûr), on brasse un peu et voilà, chacun repart avec un nouveau projet préféré!
C’est exactement ce qui s’est produit le 16 novembre dernier alors qu’on a pu assister à deux lancements que tout semblait pourtant opposer : d’un côté, le folk-rock introspectif d’Huriel. De l’autre, l’indie-rock de Vivresse. Est-ce que le public de ces derniers allait se taire et écouter le premier sans parler? Et à l’inverse, est-ce que les fans d’Huriel allaient se laisser brasser la cage avec le sourire? On a de bonnes nouvelles pour vous autres!
Huriel
Venu lancer son microalbum « II » sorti deux semaines plus tôt, Huriel est débarqué au Pantoum tout doucement, en laissant Eddy, philosophe en résidence, commencer seul.e à la dactylo. Eddy ne parle pas, mais ses gestes valent chacun mille mots. Pendant qu’on se concentre sur Eddy, le groupe mené par Hubert Gonthier-Blouin (guitare, voix) s’installe et commence à jouer doucement. On est dans le folk-rock inspiré des années 1970, c’est extrêmement doux la plupart du temps, avec des pointes plus intenses qui surprennent tout le monde, y compris Eddy.
Et comme Eddy, on a eu énormément de frissons pendant Fermer mes yeux, un petit bijou (dont le texte a été écrit par le prof Mathieu Gagnon) d’une belle tristesse qui s’écoute si bien un jour de pluie. Pas pour rien qu’Eddy traîne son parapluie sur scène, le philosophe sait que le ciel pleure beaucoup!
Eddy, c’est avec la musique la grande vedette de ce show. Complètement muet, ce personnage exprime tellement bien toutes les émotions véhiculées par les chansons jouées par le groupe! Suffit de voir Eddy trembler les rares fois qu’Hubert crie au micro (j’avoue que ça surprend) pour comprendre que notre philosophe en résidence est une personne hypersensible.
Pas de chichis, pas de fla-fla, pas d’effets visuels à couper le souffle, juste de la bonne musique jouée par Hubert, Émilie Rochette (guitare), Jade Joubert (basse) et Renaud Belles-Iles (batterie). Pis un.e philosophe aux grands yeux tristes avec qui on aimerait bien monologuer en prenant un verre ou trois.
Vivresse
On vous a parlé il y a quelques semaines de « Sainte-Vivresse », le nouvel album de la jeune formation de Québec. On vous avait dit qu’on avait bien apprécié cet effort solide qui marque beaucoup de points grâce à son rock aux multiples nuances. Et on avait bien hâte de voir comment le quatuor composé de Florence Dias (voix, claviers, flûte), Tommy Grandbois (voix, guitares), Alex Grandbois (batterie) et Mathieu Gravel (basse) allait défendre ces jolies pièces sur scène.
C’est pas compliqué, si vous connaissez un peu le groupe, vous connaissez déjà la réponse : avec la fougue de la jeunesse, la complicité de vieilleux ami.es et le plaisir palpable de jouer devant une crowd en grande partie conquise d’avance. Et ça n’a pas pris trop de temps avant que les fans d’Huriel emboîtent le pas, genre après quelques mesures d’Au nom de, y’a pas grand monde qui s’empêchait de sautiller avec le quatuor!
Parmi les moments forts, on compte Poussière, chantée avec douceur par Florence pendant que les gars l’accompagnent. Y’avait un peu de La reine et d’Hannah des Cowboys Fringants dans ce regard bienveillant sur une travailleuse du sexe laissée à elle-même, et nos amis l’ont bien rendu.
Si j’avais été bouleversé par Violette sur l’album, je n’étais pas prêt pour la claque dans la face qu’elle allait nous donner collectivement sur scène. Cette histoire d’agression sexuelle et des marques que celle-ci aura laissée fait mal à entendre. Elle crée un grand malaise, un mal-être qui ne ressemblera jamais à ce que vivra une victime, mais qui a le mérite de faire réfléchir quelques instants.
Bien sûr, y’a eu Merci et son moment flûte (et boule disco). Mais y’a aussi eu Drap blanc/Drap gris/Drap noir, ce bijou prog qui s’étend sur près de sept minutes et qui a montré que le groupe est en pleine possession de ses moyens. Si on se gardait une petite gêne sur Violette, là, je peux vous dire que les moshpits et le headbanging étaient les bienvenus, et on s’est lâché.es lousse en pas pour rire!
Dur à croire que ces jeunes viennent de sortir leur premier album. Tout est déjà si bien rodé (OK, OK, on avait déjà entendu plusieurs chansons de l’album bien avant que celui-ci ne sorte), la complicité est si palpable, on croirait qu’ils en sont à leur quatrième ou à leur cinquième, celui qu’on sort au faîte de sa gloire, et qu’on livre à un public en feu dans une série de shows sold-out dans une grande salle!
C’est probablement ce qui attend Vivresse dans quelques années si le quatuor continue de bosser aussi fort qu’il le fait depuis ses débuts.
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