SALLE LOCALE – Le Quai des Brumes

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Salle Locale, c’est une série de portraits des lieux de diffusion qui ont un rôle essentiel dans l’écosystème culturel. Cette semaine, on vous parle du créatif et éclaté Quai des Brumes situé à Montréal. Julia Blais, responsable du Booking et Jules Gauliard-Martineau, directeur général de la salle, ont répondu à nos questions.

Jules : Le Quai des Brumes a ouvert en 1985, quand une petite communauté d’artistes habitant le plateau « ouvrier » de l’époque (avant qu’il ne devienne le quartier gentrifié par excellence de montréal) a décidé qu’il leur fallait un endroit où se réunir. 

Mon père, André Martineau, me raconte que ses amis et lui se réunissaient avant dans un bar clandestin dans son sous-sol pour jouer de la musique, boire et fumer. Il n’y avait tout simplement pas d’endroit libre comme ça, où tous pouvaient s’extravertir. Car il faut le dire, c’était une belle gang de fous ! Et leurs soirées leur ressemblaient. Il parle d’évènements complètement loufoques par exemple, la soirée Lecture de poésie nue. Dans cet évènement qui se déroula durant les premières années du Quai, pour rentrer dans le bar et assister au micro ouvert de poésie, il fallait être nu ! Ce n’est qu’un exemple parmi tant d’autres et il reflète bien, je trouve, l’idéologie libertine, underground et épicurienne de cette communauté. 

Les discussions politiques enflammées y étaient bienvenues — et le sont encore. Ces gens rêvaient de changer le monde par l’art et bon nombre d’entre eux l’ont fait. Beaucoup d’artistes, musiciens, tout comme poètes, cinéastes, peintres ou autre, ayant connu des carrières internationales ont évolué à partir de ce milieu. L’échange des idées et la lubricité des esprits artistiques agissent comme un tremplin depuis l’ouverture. Dès les premiers jours, cette salle qui est un bar, mais aussi tellement plus, s’est rempli des artistes et de leurs idées et s’en est imprégnée pour ne jamais s’en défaire. Après 35 ans, on retrouve des piliers de bar qui étaient là à l’ouverture et qui donnent, encore aujourd’hui, vie à l’âme du Quai des Brumes.

Julia : La mission du Quai des Brumes : c’est de faire rayonner l’art émergent de partout, tous styles confondus. Notre programmation est principalement musicale, mais nous avons aussi plusieurs soirées de poésie, des lancements de livres, des vernissages, des lancements de clips, etc. Nous avons des évènements tous les jours, en 5@7 et en soirée. Nous avons parfois des semaines qui ont 12 à 14 évènements, et nous sommes, en temps normal, fermé que deux jours par année. Notre mission est aussi de faciliter des rencontres entre musiciens et différents types d’arts, par exemple en invitant des photographes à couvrir certaines soirées, en choisissant des Dj qui se jumèleraient bien à certains évènements, etc. On invite les artistes et le public à lâcher leur fou. Y’a pas de limites (ou presque) pour qu’un évènement soit le plus unique possible. On a eu des bands qui ont fait leurs shows dans la régie du soundman, des fontaines de fromage, des shows sur le bar, du mapping qui transforme la salle au grand complet. Le Quai est notre terrain de jeu, pour tous.

Julia : Le Quai des Brumes, ainsi que plusieurs salles du même type que nous, devient un peu le lieu de rassemblement de la communauté artistique. C’est un endroit idéal pour favoriser de nouvelles rencontres, surtout pour la création. On a souvent vu des bands « naitre au bout du bar », des musiciens qui se rencontrent enfin, discutent, créent un band (et wow, ça fait de beaux projets !). Le Quai est la deuxième maison pour beaucoup de gens aussi. Parfois, on voit des artistes qui arrivent de tournée internationale débarquer avec leurs baguages avant même d’aller chez eux. 

Julia : OUF. Il y en a tellement ! Je pense qu’on pourrait faire un roman ou une série télé avec tout ce qui se passe au Quai dans une soirée, une semaine, une année… mais depuis 35 ans ? Y’en a trop haha ! Chaque soirée est différente, on ne sait jamais qui va apparaître dans la soirée et changer totalement l’ambiance (plus souvent pour le mieux que pour le pire haha). Il y a eu, entre autres, un fameux after du Déplogue de Louis-Philippe Gingras qui s’est transformé en « DIMANCHEST ». Ça prend juste 4 personnes bien motivées à se mettre torse nu un soir de canicule, une photo instagram, puis c’est parti. Les gens arrivent en courant au Quai en enlevant leur t-shirt, la salle est pleine, y’a du monde qui danse sur le bar, les gens ont du fun. Et ça, c’est UNE soirée parmi TANT D’AUTRES… 

Salle locale est présenté en collaboration avec Lepointdevente et Bar Spectacle – La série virtuelle, qui se veut une collaboration entre lieux de diffusion alternatifs et artistes en temps de confinement. Dans le cadre de ce projet, les artistes sont invité. e. s à parrainer un lieu de diffusion afin de lui venir en aide pour sa survie. 

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