Étienne Dufresne – « Sainte-Colère »

PAR

La maison de disques Chivi Chivi lançait le 21 février dernier Sainte-Colère, le premier micro-album de son nouveau protégé Étienne Dufresne. C’est en proposant un son de grande qualité enregistré et mixé par nul autre que Jean-Bruno Pinard (Les Louanges, Laurence-Anne, Mon Doux Saigneur) que Dufresne fait son entrée sur la scène musicale du Québec où il pourrait bien prendre racine!

L’autodidacte évolue dans le milieu de la musique émergente en tant que photographe et artiste visuel depuis déjà un moment. Ainsi, en immortalisant des artistes tel que Klô Pelgag et Lydia Képinski, il a apprivoisé la scène musicale montréalaise. Puis, au fil des événements de la vie, le voici maintenant en train d’accoucher de ce premier enregistrement : vingt-deux minutes de synth-pop nonchalante d’où découle un fragile réconfort.

En toute subtilité, l’album dresse le portrait d’une génération affectivement fragilisée. Les textes sont authentiques, racontant sans détour des situations de la vie quotidienne, induisant des images dans l’esprit de l’auditeur qui ne peut que s’y reconnaitre. Les sujets qui y sont abordés sont le reflet de la réalité actuelle, où l’émancipation sexuelle et le dating numérique devient la norme.

Reste donc jusqu’au petit matin, tu peux m’ghoster demain. 
Restons plus que juste copains, tu peux m’ghoster demain.

Copains

Copains, la plus accrocheuses de l’album par sa touche mélancolique, nous fredonne la peur de l’engagement en nous berçant tranquillement l’âme. La pièce est un voyage introspectif dans nos blessures en plus d’être à la fois l’onguent qui soulage nos plaies. Abordant l’ambivalence et l’envie de fuir, le narrateur nous y exprime également son besoin d’affection.

Quand est-ce que vous allez vous frencher? 
Ça fait déjà longtemps qu’t’es son homme.
Ta vie est un party qui lève pas.
Ton cœur est en rodage, pis je ris pas.

Rodage

Dans Rodage, on aborde la paralysie amoureuse malgré les évidences, de l’inaction qui pourrait être le résultat des craintes, de la peur de l’abandon, de la peur du rejet. Fantômes pour sa part, semble référer aux rencontres passées auxquelles on s’est attaché malgré nous. Finalement, dans Foudre, on cherche des réponses, des façons de vivre le tout, suggérant que c’est peut-être mieux de voir ça comme un jeu. 

Une chose est certaine, qu’on traite de notre réalité ou de celles des gens qui gravitent autour de nous, à elles seules ces chansons mettent en lumière les difficultés relationnelles de beaucoup d’entre nous. Et si les textes de l’artiste se voulaient une libération assouvie par l’écriture automatique, le résultat en est percutant. Impossible pour l’auditeur attentif de ne pas se remettre en question, de fuir le vide en son ventre qui s’immisce entre les notes lourdes.

Et la colère dans tout ça? Est-elle la genèse ou le résultat? Dans Sainte-Colère le chanteur s’adresse à elle, l’invitant à faire son show. Serait-elle dans l’attente de se manifester, latente sous l’emprise de l’inaction et de la bonne conscience? Dans tous les cas, elle ne se retrouve pas dans la douceur des six chansons de ce premier album de Dufresne, pas plus que dans le feutre de sa voix posée et envoutante.

Ma génération est peut-être paralysée par la peur de l’engagement, mais mon cœur est définitivement en train de tomber musicalement amoureux de ce nouvel auteur-compositeur-interprète, me laissant dans l’attente de ses prochains titres comme on espère la prochaine date. Sainte-Colère, c’est une dose d’amour propre à s’offrir à soi-même. #selflove

VOUS CHERCHEZ QUELQUE CHOSE?