Festival OFF de Québec – Compte rendu, 4 juillet 2019

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Le soleil a pris sa job au sérieux en ce jeudi torride, premier jour du Festival d’Été de Québec. Nous, pendant ce temps-là, on allait profiter de l’offre diversifiée et savoureuse du OFF. Au menu, des découvertes musicales dans une ambiance chaleureuse au Fou-Bar, une énergie contagieuse sur fond de soleil couchant au Parvis et une soirée électrisante d’intensité au Complexe Méduse. 

Le Fou-Bar

18h00  – Timothy Luke Dawson

Si le musicien a su montrer dans ses autres projets qu’il n’a pas peur de l’expérimental et de la dissonance, c’est plutôt un folk doux aux contours country que Timothy Luke Dawson nous a présenté hier en compagnie de sa douce moitié, Isabeau Valois. Lui à la guitare acoustique, elle au banjo (bien qu’elle soit ensuite passée à la guitare elle aussi), ils amalgamaient les mélodies et les harmonies de leurs instruments tour à tour dans de jolis entrelacs. Leurs voix, elles aussi, se mêlaient pour mettre de l’avant les textes de l’auteur-compositeur-interprète de Québec. Une beau moment ponctué de blues, d’anecdotes et de rires.

Marie-Ève Fortier

19h00  – Marie Claudel

Accompagnée par David Marchand (zouz) à la basse ainsi que par Jean-Philippe Levac aux percussions, Marie Claudel savait se défendre autant à la guitare que derrière le micro. Elle nous a chanté ses compositions de sa voix claire, articulée, pendant qu’elle et son groupe les ancraient bien au sol en exploitant surtout le registre grave de leurs instruments. En somme, la formule « un peu rock » du projet personnel de l’autrice-compositrice-interprète pouvait déménager, faire dans le rock old school autant que dans les ballades blues, et nous surprendre au détour de quelques accords par leur dynamisme. Seule sur scène pour la fin de sa prestation, Marie Claudel nous a chanté La longue course qui respirait, comme le reste, l’insouciance et l’audace.

Marie-Ève Fortier

Parvis de l’Église Saint-Jean Baptiste

19h00  – Sunderloom

La première pièce sans voix, à cause du vent ou d’un problème technique… ouf! J’ai eu besoin d’un temps d’adaptation avant d’arriver à apprécier sincèrement le son sur lequel j’aurais pu, au final, danser les yeux fermés devant un mur de pierre il y a vingt ou trente ans. Les quatre musiciens de Québec ont su garder leur calme et le vent a finalement tourné du bon bord. Sunderloom, c’est Charles Bélanger (batterie), Mathieu Michaud (basse), François-Gabriel Marcotte (claviers et guitare) et Alinoë Schneider (voix, guitare et clavier). Le groupe qui a attiré graduellement une belle petite foule sympathique sur le Parvis de l’Église Saint-Jean Baptiste prévoit sortir un album cet automne.

Katia Desgranges

20h00  – Bluesmousine

On a vite compris quelque chose hier au Parvis de l’Église, pendant que quatre musiciens aux pseudonymes à coucher dehors se déhanchaient, costumés, derrière leurs instruments:

c’est qu’avec Bluesmousine, tous les coups sont permis pour accrocher vos oreilles (quitte à chanter la même petite catchphrase en chœur, encore et encore, oui oui!). En effet, sous leur nouvelle identité, les membres du groupe s’éloignaient sensiblement de leurs projets respectifs – FUUDGE, The Blaze Velluto Collection et Les Indiens – pour nous faire vivre un bon moment. Impossible de se retenir de bouger au moins la tête ou les pieds tandis qu’ils nous faisaient voyager dans le temps avec leurs compositions, empruntant les ouh-ouh des Beach Boys et les mélodies prog de Caravan, les solos endiablés à la Santana (accompagnés de bongo, bien évidemment) ou encore la soul de Curtis Mayfield.

Marie-Ève Fortier

21h00  – Bon Enfant

Ce n’est pas pour rien qu’en les présentant Jean-Étienne Collin Marcoux les a qualifiés de power band; dans cette formation, Canailles (Daphné Brissette, voix) rencontre Ponctuation (Guillaume Chiasson, « guitawwre », voix)… Et le duo sait s’entourer! Avec Alex Burger à la basse, Melissa Fortin au piano et Etienne Côté à la batterie, tous les ingrédients étaient présents pour faire de Bon Enfant une formule gagnante. 

Mais le mot « formule », ça leur colle mal. C’est plus une famille, une bande de troubadours qui vous chante la pomme sans apparât, mais avec tout le talent du monde. C’est ensoleillé, rock, bluesé, psychédélique, groovy, hétéroclite tout en restant irrémédiablement accrocheur: on veut chanter à tue-tête les paroles qu’on ne connaît pas encore, parce que pour l’instant il n’y a que Ménage du printemps qu’on peut se mettre sous la dent. Et finalement, on veut danser, comme les quinze aventureux qui se sont lâchés lousses hier sur le Parvis, balayés par les derniers rayons du couchant. 

Marie-Ève Fortier

Complexe Méduse

Arrivés au Complexe Méduse, en sueur déjà, pendant que les deux tiers du groupe local VICTIME faisaient résonner leur répertoire de DJ set marginal et dansant. On en a profité deux secondes, avant de se précipiter dans les salles pour aller voir les spectacles qui s’enfilaient avec une efficacité rigoureuse. 

21h30  – FEUXDEFORÊT

La soirée à Méduse a débuté avec aplomb avec le premier concert de FEUXDEFORÊT, un quatuor stoner rock bâti autour des interactions entre le saxophone baryton de Guillaume Tardif (MAP) et la batterie de Nicolas Girard (Grand Morne). Un tonnerre d’applaudissements a ponctué la performance de cet ensemble hors norme dès la fin du premier morceau. Même si seulement trois compositions avaient été dévoilées au public au préalable, le set a su maintenir l’intérêt du public en plus de confirmer que le groupe est à surveiller.

Et comme si la première performance n’était pas encore assez solide comme ça, de jolis dessins animés en direct complétaient le tableau et contribuaient à l’hypnose musicale.

François-Samuel Fortin

22h15  – Lydia Képinski

Si l’on aimerait comparer Lydia Képinski à l’albatros de Baudelaire quand il redevient roi de l’azur, il est plus approprié, comme elle, de parler du condor, un oiseau de proie qui se contrecrisse bien de ce que tu penses de lui quand t’es pas fin, et qui peut se défendre si tu essayes de te mettre dans ses pattes. Toujours est-il qu’hier, l’artiste de Montréal nous a confirmé qu’elle a pris son envol et que ses chansons ont atteint leur plein potentiel sur scène. 

En plus de ses deux fidèles et excellents musiciens, Blaise Borboën-Léonard (synthés, claviers et violon-mutant) et Stéphan Lemieux (batterie), l’« enfant spéciale » s’était aussi entourée d’un guitariste et d’une choriste/claviériste, ce qui lui a permis de se concentrer davantage sur une autre de ses plus grandes forces – en plus de sa maudite bonne musique – la présence sur scène. Du début à la fin, elle a captivé et électrisé les foules avec son énergie inépuisable et son attitude émancipatrice. Pas besoin de vous dire que ça se bougeait le popotin et que ça sautait partout dans la salle comble du Complexe Méduse! En plus, on a eu droit, pogné en sandwich entre les pièces de « Premier juin», à quelques remix bien transcendants tirés de son tout dernier disque. De quoi nous faire ressortir de là tout étourdis, ivres d’exister. Parce que c’est ça que ça fait, quand Képinski et sa gang mêlent la force de leur pop aux profondeurs vertigineuses des gouffres de l’âme. 

Marie-Ève Fortier

23h00  – Mon amie Souffrance

La vibe parfaite pour poursuivre le buzz post-existentiel. Comme les quatre musiciens de Mon amie Soufffrance, le public est assis. Eux comme nous, on fait ça pour se concentrer sur la musique…mais détrompez-vous, ce n’est pas parce que c’est doux! Non. Avec une précision fulgurante, les deux guitaristes, le bassiste et le batteur – qu’on a tous déjà vus quelque part, que ce soit dans le Charme, St-Élias ou les Martyrs de Marde – se lancent dans des cavalcades instrumentales époustouflantes, sans jamais faire dans le froufrou. De quoi nous plonger dans une sorte de transe musicale pour explorer les profondeurs et les limites de la musique, le tout dans une ambiance non dépourvue d’un certain humour, tel qu’en témoigne les titres fantaisistes des tounes tel que Bobo sabotage ou encore Les bouts de chou de la COLÈRE. Pour réécouter les pièces de Mon amie Souffrance, suffit d’aller s’enfiler les deux titres de leur maxi tout fraîchement paru hier.

Marie-Ève Fortier

00h00  – Atsuko Chiba

Les oiseaux de nuits vous le diront, Atsuko Chiba valait pleinement l’attente… et son pesant d’or. Je n’avais entendu/lu que d’excellents commentaires à l’égard du quintette montréalais. Hé oui, je suis le prochain à les tarir d’éloges.

Le portrait global : cinq gaillards mijotant une sauce à saveur post-punk expérimentale des plus somptueuses. Réglés au quart de tour, les protégés de Mothland nous donnent une méchante claque psychédélique en plein minois. Quelques élans vocaux de Karim Lakhdar ne sont pas sans rappeler Rage Against the Machine (propos de Pierre-Alexandre Tremblay) alors que je compare parfois leurs trames à celles de Suuns et de Swans. 

Conseil post-pestacle: Atsuko Chiba, l’album « Trace »… pèse sur play!

Gabriel Tremblay

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