Thus Owls (+ De la Reine) – La Source de la Martinière, 18 octobre 2018

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Si tu connais un peu le quartier Saint-Roch, peut-être considères-tu De la Reine comme étant une rue débutant sur le boulevard Langelier et longeant une partie de la rue du Prince-Édouard. Cependant, De la Reine, c’est plus qu’une rue. C’est un band. Pis tout un band à part de t’ca! D’ailleurs, la foule rassemblée à La Source de la Martinière ce soir est d’accord avec moi; pour preuve, le groupe a le plaisir de recevoir une vague d’applaudissements avant même d’avoir commencé à jouer. Tous habillés de noir, c’est dans un nuage de sons que le concert commence. Odile Marmet-Rochefort (voix et claviers) est l’élément planant de la chanson alors que Vincent Lamontagne (guitare) ainsi que Jean-Etienne Collin Marcoux (Synth et batterie) s’occupent d’emporter les auditeurs dans ce langoureux moment à écouter Le Temps qui Passe.

Tout d’abord, ce qui tape immédiatement à l’oeil, c’est le fait que ce soit quand même pas mal impressionnant d’observer un drummer avoir une telle aisance à jouer deux instruments à la fois. C’est en exécutant un impeccable roulement d’une seule main dans la chanson Impérativetout en faisant vibrer les poitrines avec le synth, occupant le registre de la basse, que l’on comprend que Jean-Etienne est un être qui apprécie les défis et surtout sait les relever.

Cependant, ce qui fait réellement triompher le band est leur capacité à se faire briller les uns les autres. Ainsi, dans chacune de leurs pièces figure toujours un moment où le talent de l’un des membres est mis de l’avant ; ceci a pour effet de permettre une véritable explosion musicale lorsqu’ils s’y mettent tous en même temps. Bref ca vaut vraiment la peine d’aller voir De la Reine! En plus, petit scoop : il semblerait qu’ils entament l’écriture d’un deuxième album! Wouhou!

Ca ne prend que quelques secondes avant que la voix de prêtresse d’Erika Angell (Thus Owls) ne saisisse la foule. Immédiatement sa présence emplit l’entièreté de la scène. Toutefois, le ton solennel qu’emprunte la Suédoise est de mise puisque ce soir ils feront des chansons extraites de leur nouvel album qui traite d’un sujet abordé avec toute la pesanteur que permet la plume d’Erika : avoir un enfant. Plus tard d’ailleurs, la chanteuse se confie sur le sujet. « Ce nouvel album, The Mountain we live upon, porte sur le choix. Sur la voie qu’une femme choisit de suivre. Sur la transition en le fait de ne pas vouloir d’enfant et le fait d’en avoir un. » (NDLR : traduction par un professionnel, n’essayez pas cela à la maison)

Afin de saisir l’amplitude de cette confidence, il faut savoir que le groupe est tout d’abord formé de Simon Angell (guitare) et Erika Angell (voix et synthétiseur) qui sont à la fois partenaires dans le band et dans la vie de tous les jours. Le couple nouvellement parent devient donc la matérialisation vivante, le témoignage absolu, des chansons qu’ils présentent. De plus, ce couple créateur se voit accompagné par un batteur d’exception, Samuel Joly, qui prodigue au son particulier de Thus Olws toute la technique et l’intensité dont il est capable. Erika termine Lover mother de sa voix de messie qui rappelle Patti Smith et se lance dans Take me over. C’est Samuel qui prend le lead faisant résonner ses percussions telles des tambours de guerre tandis que la guitare de Simon instaure un rythme acharné. S’élève après plusieurs mesures, dans la sourde violence du rythme sans répit, la voix d’Érika :

« How I did resist it
To let go of what I know
Now I am falling
With no perception of the ground… »

Erika a quitté son clavier et se dresse devant la foule, accoutrée de vêtements à motif léopard et zébré, la voilà animale. Elle devient soudain la mère louve qui laisse l’amour pour son enfant take over. Toutefois on découvre aussi toute la sensibilité dont elle est capable dans la prochaine chanson, Ashore, où sa voix se fait berceuse. On retrouve cette même fragilité dans Shadows, un véritable bijou qui vaut la peine d’être écouté.

Coté instrumental c’est dans la chanson Black Matter provenant de l’album du même titre que l’auditoire est foudroyé par la virtuosité de la batterie et de la guitare. Tout d’abord, Samuel entame la chanson par un solo qui fait tomber quelques mâchoires. Ensuite, sans crier gare, se déploie le talent de Simon qui au tiers de la chanson exécute une solo prodigieux dans son originalité et son utlisation de sa semi-hollow rouge. Plus tard, il redéploie cette même originalité en sortant un archet pour la chanson A shade of green.

Simon est l’un de ces guitaristes qui choisit de mettre de l’avant la chanson plutôt que ses propre capacités à la guitare. Ce n’est pas parce qu’il peut aller vite qu’il le fera, tout dépendra de ce dont la chanson a besoin. Ainsi, chaque note est calculée afin de permettre à la pièce de pouvoir créer la réaction désirée, chaque son est choisi afin de permettre l’atteinte une apogée mélodique sans pareil.

Le spectacle prend fin après avoir présenté l’entièreté de leur nouvel album ainsi que quelque-uns de leurs succès antérieurs dans une synchronicité remarquable avec As long as. Pour ce morceau à la finale entièrement instrumentale, Erika devient chef d’orchestre et compte les mesures alors que Simon et Samuel parviennent à faire grimper l’intensité jusqu’à ce qu’arrive la finale – une finale qui résonne encore aujourd’hui dans mes oreilles.

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